Dans l’indifférence romande la plus totale, la 13ème commémoration du génocide rwandais a eu lieu en Suisse. Aucun des grands journaux de la partie francophone de l’Helvétie n’a à ma connaissance accordé la moindre ligne au terrible souvenir du massacre qui a vu 800’000 Tutsis et 200’000 Hutus périr dans un bain de sang au Rwanda, en 1994. Le soir du 6 avril de cette année, l’avion du président Juvénal Habyarimana était abattu, entraînant le pays dans le chaos. Dans les deux jours qui suivent, les tueries commencèrent à s’organiser pour devenir le plus grand génocide depuis la Seconde Guerre Mondiale, et peut-être le seul qui ait eu cette proximité entre bourreau et victimes : quel que soit le côté de la machette où qu’on se soit trouvé, on se connaissait, on vivait ensemble tous les jours.
Silence assourdissant en cette journée de recueillement, qui n’est pas sans rappeler celui qui plana lors du génocide lui-même parmi les grandes puissances. La section suisse de l’association Ibuka a pourtant présenté dans la ville de Lausanne un programme de choix, avec l’allocution de l’ambassadrice du Rwanda en Suisse et des témoignages croisés avec des Arméniens (le premier génocide du XXème siècle). Mais rien n’y fait, le génocide rwandais n’attire pas les foules helvétiques; trop loin (dans le temps et l’espace), trop d’actualité (les dernières frasques des people), trop de méconnaissance parmi les journalistes pour traiter du sujet, le sujet est peut-être aussi trop nègre. Alertés sur l’imminence de la commémoration, les journalistes se sont déclarés potentiellement intéressés, mais à l’arrivée, il semble que les choix en rédaction se soient portés sur le local, le bancal. Encore et toujours le nombril, cela évite d’avoir à lever la tête.
Heureusement pour nous, ce ne sont pas les journalistes qui font l’actualité. Le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon a appelé le 9 avril – à 13 ans près, le jour “officiel” du démarrage du carnage – à un “partenariat global contre le génocide”, pour que de tels crimes ne se reproduisent plus.
Mesure annoncée : la place de rapporteur spécial pour la prévention de génocide sera transformée en poste à plein temps. En langage onusien, cela signifie la création d’un service consacré à la prévention de génocide : l’ONU qui tend de telle manière le bâton aux USA pour se faire battre, cela frise le masochisme institutionnel.
Au sein d’une déclaration somme toute très consensuelle, M. Ban a déclaré que “tout le monde a un rôle à jouer : les gouvernements, les médias, la société civile et ses organisations, les groupes religieux, et chacun d’entre nous”. En effet, rappelons que les médias ont joué un rôle éminent dans l’appel au meurtre lors du génocide rwandais – notamment la radio “Mille collines”, tristement célèbre.
A croire qu’on entend trop ceux qui devraient se taire, et que ceux qu’on devrait entendre restent coi.
où étaient les européens quand les massacres se déroulaient? je pense que si on voulait réagir c’était pendant que les gens souffraient…
je pense que meme si les journalistes n’étaient pas présents pour en parler tant que les gens seront toujours là pour ne parler et s’en souvenir ce massacre restera gravé dans les mémoires à jamais. ne déspérez pas.
Salut Abigane,
Ce site n’est pas destinées aux rencontres. Aucun autre message de ce genre ne sera toléré.
Salut
je suis une fille de non de abigane agée de 27ans . je suis du canada eet desire me correspondre avec toi quelque soit ta nationalité.
Alors je veux que tu me repond .
abigane20@yahoo.fr
voici un compleent sur les infos concerant le genocide des rwandais de l interieur en 1994 http://www.r94.org
C’est plutôt sur le sujet “peine de mort” que je viens d’écrire qu’il aurait fallut mettre cet article 🙂
Depuis l’écriture de cet article, la peine de mort a été abolie au Rwanda. Pas sûr que ça mène à un plus grand nombre de bourreau traduits en justice, mais comme souvent dans ce type de situation, on doit faire un choix entre la justice et la paix sociale…
http://www.liberation.fr/rebonds/216856.FR.php
Rebonds
Abolir la peine de mort au Rwanda permettrait l’extradition des génocidaires présumés.
Ne tuons pas nos bourreaux
Par Yvonne MUTIMURA
QUOTIDIEN : mardi 14 novembre 2006
Par Yvonne Mutimura rescapée du génocide des Tutsis au Rwanda.
Le 27 mai 2004, dix ans après le génocide des Tutsis, je sortais de terre, à Cyuga, les ossements de ma mère, Adèle, de ma grand-mère qu’on appelait Bibi, de Lydia, ma petite cousine de 8 ans, de Séraphine, une adolescente de 17 ans, et de Drocelle, une amie de ma mère. Hormis le corps de ma mère, qui était enseveli près de sa maison, j’ai extrait tous les autres des latrines, où leurs bourreaux les avaient jetés, le 8 avril 1994. Ces bourreaux étaient leurs voisins hutus, persuadés, par la propagande antitutsie, d’accomplir un acte politique. A quelques kilomètres de là, à Kigali, ma petite soeur Providence, mon frère adoptif Jean de Dieu et son épouse Christine, mon père Jean-Baptiste, mes demi-frères et soeurs et une centaine d’autres membres de ma famille ont subi le même sort.
Ils ont été tués parce qu’ils étaient tutsis et que tous les Tutsis du Rwanda devaient mourir. Certains de leurs assassins sont en prison, certains vivent encore librement au Rwanda ou ailleurs, d’autres enfin sont morts. Les crimes qu’ils ont commis sont inexcusables, dépassent l’entendement. Personne n’a le droit de m’imposer une réconciliation avec ces tueurs, capables de jeter vivantes ma petite Lydia, ma vieille Bibi, dans des latrines ! Lorsque ma famille me manque trop, lorsque les cauchemars m’assaillent, lorsque ma peine est trop vive, je leur souhaite le pire. Mais je ne veux pas qu’ils soient condamnés à mort par une décision de justice rendue au nom du peuple, au nom des hommes. Les tuer comme ils ont tué, c’est se rabaisser à leur niveau : celui de la barbarie. C’est pourquoi je suis fondamentalement opposée à la peine de mort.
«Certains des auteurs du génocide au Rwanda ne comparaîtront jamais devant le Tribunal international, ni devant les cours rwandaises. Sauf si les parquets d’autres pays poursuivent en justice les accusés qui arrivent sur leur territoire, des personnes coupables des crimes les plus atroces pourraient s’échapper sans punition» (Alison Des Forges, historienne, consultante pour l’ONG américaine Human Rights Watch). Les Etats européens n’extradent pas un suspect vers un Etat où la peine de mort est en vigueur. Malgré cela, après le génocide, le nouveau gouvernement rwandais a choisi de maintenir la peine capitale, regrettant même qu’elle ne soit pas appliquée par le Tribunal international pour le Rwanda lors de sa création, arguant que son abolition était prématurée et serait difficilement comprise par la population et par les survivants du génocide.
Aujourd’hui, des génocidaires qui ne sont pas poursuivis par le Tribunal pénal international pour le Rwanda  parce que ce ne sont pas les plus hauts responsables  vivent librement en Europe. Certains Etats arrêtent les plus en vue. Une poignée a été jugée. Mais pour les autres l’Europe est un havre de paix et de quiétude. Pourquoi ? Les Etats européens n’ont aucune intention d’arrêter ces hommes, car ils savent qu’ils devraient les juger. Le procès d’un Rwandais, c’est long, compliqué et très cher. La Belgique en a organisé deux, ce qui est exemplaire et exceptionnel. Cependant, des Belges disent aujourd’hui qu’il ne leur revient pas de juger des Rwandais accusés d’avoir commis un génocide contre des Rwandais au Rwanda. Même si de nombreuses personnes, soupçonnées d’avoir activement participé au génocide au Rwanda, vivent en Belgique, aucun autre procès n’a eu lieu et n’aura vraisemblablement lieu.
Le 8 juin 2004, la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme, pour n’avoir pas jugé dans un délai raisonnable ma plainte avec constitution de partie civile, portée dès 1995, contre un prêtre rwandais, pour des faits de génocide. Douze ans plus tard, l’instruction ouverte à l’encontre de l’intéressé est toujours en cours. Ce prêtre continue d’officier, tandis que d’autres Rwandais également soupçonnés d’avoir participé au génocide, vivent en France sans crainte.
La peine de mort n’est plus appliquée au Rwanda depuis 1998. Comme partout dans le monde, mais peut-être plus encore au Rwanda, la peine de mort est populaire et de nombreuses voix s’élèvent pour qu’elle soit maintenue. Un projet de loi visant à l’abolir va être prochainement examiné au Parlement.
Abolissons la peine de mort, pour que notre peuple puisse enfin rapatrier et juger ses criminels en présence de leurs victimes, pour qu’enfin justice soit rendue à nos familles au terme de procès équitables, au Rwanda, par des juges rwandais. Et pour que la barbarie reste l’apanage des barbares.
Yvonne Mutimura est employée par le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. Les opinions exprimées ci-dessus n’engagent que l’auteure et ne reflètent pas nécessairement les opinions du Tribunal international ou des Nations unies en général.
http://www.liberation.fr/rebonds/216856.FR.php
© Libération
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