Mushishi

Une poésie aussi vieille que le monde

mushishi appel de l'oiseauQu’est-ce qu’un Mushishi ? La raison dirait « c’est un expert en Mushi ». Mais la poésie, qui s’éloigne du rationnel pour rejoindre l’âme, expliquerait que « c’est un maître qui fait tomber des cornes qui poussent à causes de mots d’oreilles ». A cheval entre les deux mondes, entre le logique et l’impensable, l’expérimental et l’imaginaire, l’explicatif et le contemplatif, Mushishi est un anime – aussi nommé « japanime », pour film d’animation japonais – qui vogue d’une rive à l’autre sur le Nil de la vie.

Au coeur de Mushishi on trouve l’essence de l’existence, propulsée par la force d’une pompe. Un flux vital vieux comme le monde, qui coulait bien avant que l’homme ne s’imagine; les pulsations étaient premières, l’être n’est venu se greffer que par la suite, recouvrant la source première : le Mushi, cette soupe originelle qui vit autour de nous, mais que trop absorbés par notre raison, nous sommes devenus incapables de voir. Nous lui faisons de l’ombre, et seuls quelques individus sont encore à même de détecter l’origine de toute chose.

Mushishi et la quintessence brute

Mushishi parle de la quintessence vitale de manière aussi contemplative et détachée que possible. S’extrayant de tous les principes moraux, les Mushis, ces parcelles de vie que la série se refuse à en expliquer le pourquoi (contrairement au comment) croisent sur leur chemin les humains. Après tout, la morale est une création humaine; la vie n’a que faire de nos constructions. Parfois ils causent du tort ou du chagrin aux hommes, et parfois ils vivent en symbiose avec eux. Tel un épisode consacré à la recherche d’un Mushi prenant l’apparence d’un arc-en-ciel : « ce Mushi a une raison d’exister, mais pas de but à son existence ». Il n’y a pas de raison supérieure à leur présence, seulement une rencontre, une bifurcation commune avec les protagonistes : ou plutôt une fatalité. Apprendre à vivre avec eux, malgré inconvénients ou avantages, est le rôle de Ginki, l’expert en Mushi. Lui-même, mi-mushi mi-humain, émet rarement de jugements, et observe avec distance le chaos et l’ordre se chercher, se trouver et coexister. Ce que l’humain apprivoise il le détruit, et le Mushi en fait parfois de même avec l’homme.

C’est avec grande pertinence qu’un ami a lié Mushishi au shintoïsme, la religion ancestrale du Japon, existant au pays du soleil levant bien avant qu’il importe le bouddhisme. Polythéisme animiste, cette croyance postule en l’existence d’un être divin, composé de particules nommées « kami »; de la à voir les Mushi, il n’y a qu’un pas que le spectateur est invité à effectuer sans hésitation. Tout comme de dévorer cette série, poétique, contemplative, et qui vous connecte avec je ne sais quoi. Le pourquoi n’est pas important; seule la connexion l’est.

Laisser un commentaire