Des criminels pour pacifier l’Irak

C’est bien connu, il n’y a rien de tel pour attraper un voleur, qu’engager un autre voleur.

La même logique semble être en oeuvre en Irak, où comme l’explique Philippe Grangereau (sur Libération), les criminels étasuniens sont envoyés au front pour maintenir l’ordre. Comme il le rappelle justement, bien qu’à travers un raccourci un peu rapide, les bavures commises par les GI’s pourraient avoir une explication dans le pédigrée des militaires US.

Les militaires sont rarement la fine fleur d’une nation, ce type de carrière n’attirant qu’au compte goutte les hommes compétents. Surtout parmi les simples soldats, où les qualités requises se limitent à obéir et tuer, que l’on pourra dresser comme des Pit Bulls. Pas besoin d’aller les chercher dans les hautes universités étasuniennes des hommes et des femmes sachant le faire.

Notons toutefois que ces individus ont été reconnus coupables de crimes, même si les chiffres avancés par Libération sont à prendre avec mesure, tant le quotidien vire progressivement au n’importe quoi [1] et accroît toute la méfiance d’usage. La justice du pays a reconnu qu’ils étaient en infraction avec le code pénal, et on les envoit dans un pays où toute leur haine déjà condamnée pourra trouver un terreau plus propice pour éclore : la peur des représailles s’éloigne, l’esprit vengeance (contre un société qui les rejette, contre une vie si misérable chez eux qu’ils sont poussés au crime) peut s’exprimer avec bien moins de contraintes. Les zones de guerres sont évidemment propices à la rage; mais peut-être vraiment y envoyer des hommes connus pour ne pas savoir la contrôler ?

L’abaissement des critères de recrutement est un révélateur de la difficulté pour l’administration Bush de mener différentes guerres de front. La vision de la guerre au USA s’est modifiée, tant sur le plan politique, avec l’arrivée en force des démocrates au parlement, que sur le plan populaire, avec les citoyens ouvrant les yeux sur l’échec – pourtant programmé – de la lointaine guerre. Ce signe est interprété par l’Iran comme un aveu de faiblesse, tant en termes financiers qu’en termes militaires. Et c’est certainement pour cette raison que l’Iran continue de refuser les exigences du Conseil de sécurité de l’ONU, l’exhortant à cesser le développement de l’arme atomique. Les gains attendus au sein du monde arabe, considérables si l’Iran parvient à s’imposer en tant que pays leader de la cause musulmane (ce dont la région manque cruellement), surpassent les « petits risques » de voir les USA envahir la région, surtout si la Chine et la Russie traînent des pieds. A la manière d’un Chavez, d’un Poutine, l’arme pétro-gazière est utilisée sans tabous. Accords d’exploitation avec la Russie, d’exportation avec la Chine, les deux pays n’oseront jamais aller trop loin dans la condamnation de l’Iran. Le recours à la force ne sera évidemment jamais voté au Conseil de sécurité.

Si Robert Gates, le secrétaire à la défense, explique aujourd’hui que concernant l’Iran, rien n’est exclu (« Toutes les options sont sur la table »), ce n’est pas tant pour être crédible, mais pour rappeler que l’Oncle Sam n’est pas toujours rationnel. Nous l’avons vu en 2003. Et une attaque en solo, éventuellement épaulée cette fois-ci par futur président élu en France, est imaginable. Même si tous les indicateurs et conseillers disent le contraire, les Etats-Unis sont crédibles lorsqu’ils disent pouvoir imaginer envahir l’Iran. Et pour une bonne raison : si cela venait à se produire, le peuple américain ferait front comme depuis le 11 septembre 2001. Ramener à l’âge de la pierre un peuple voulant passer à l’ère atomique qui appelle à la destruction d’Israël, c’est encore plus facile à vendre que de ridicules photos qui ne démontraient absolument rien des capacités militaires de l’Irak.

Références

  1. La qualité est régulièrement en baisse. Le sous-titre de l’article en question affiche fièrement que « faute de volontaires, près de 10 % des recrues ont un casier judiciaire. » On apprend plus loin qu’au sein des 10% de recrues qui bénéficient des critères d’admissions moins élevés, un grand nombre le seraient en raison de surpoids. Soit l’obésité est considérée comme crime au USA, soit le titre est là pour faire vendre, soit (cette solution a ma préférence) les journalistes français ont une telle haine envers les Etats-Unis qu’ils sont incapables du moindre recul. []

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