Idéalisme et illumination au pays du matérialisme

Ca fait quelques temps déjà que j’ai un post à finir sous le coude, donc je me lance : les USA, leur trajectoire historique, le matérialisme opposé à l’idéalisme. Une comparaison avec la France, qui pendant plus d’un siècle a détenu le monopole de l’idéalisme légitime. Rien que ça, et ça va aller très vite.

La grande partie des USA, lors du premier semestre 2003, c’était ça (cliquez sur l’image pour en voir une version agrandie) :

NATO french ally
chirac dummy
surrender for dummies
french military defeats

Bien sûr, maintenant ça prête à sourire. En ce jour, le nombre de soldats US tués en Irak a dépassé le nombre de 1000. C’est autant que la bousculade meurtrière du 1er sept. en Irak, et peut-être un dixième (1/10) du cyclone Katrina. Les chiffres sont posés, on pourrait presque les croire dénués de sens. Sauf que pour un Etasunien (un Néo-Orléanais, du moins), il reste toujours plus dangereux de rester chez soi, que de partir faire la guerre en Irak. Et pour un Irakien, il est catastrophique de vivre chez lui, mais pour lui, il n’y a pas d’alternative.

C’est diamétralement opposé à ce type de raisonnement, dans un premier temps, que les Etasuniens vont rester chez eux pendant un bon siècle, se calfeutrant autour d’une doctrine Monroe protectrice. Cette doctrine n’avait rien d’impérialiste, elle ne répondait qu’aux alliances européennes de l’époques.

C’était une époque où le matérialisme étasunien se construisait à une vitesse aussi folle que l’on posait des rails pour repousser la Frontière. L’idéalisme étasunien, socle sur lequel a été fondé le pays, se voyait donc progressivement mis en concurrence au fur et à mesure que la grande nation nord-américaine se développait. Jusqu’à atteindre, dès la fin du 19ème, des contradictions de plus en plus forte. Le capitalisme ne pouvait continuer à se développer à une vitesse aussi foudroyante, l’Amérique latine devenait bien trop intéressante.

C’est une vision quelque peu léniniste, mais qui explique pourquoi tant de conflits avec l’Espagne, avec la Grande-Bretagne, avec la France. Parfois résolus au moyens de dollars, parfois au moyen de la force (bien que relativement rare), les USA devinrent une grande puissance parce qu’elle se mêlait des affaire des autres. Parce que son idéalisme la prédestinait à jouer une rôle pivot dans les relations internationales, comme la France l’avait fait à son époque. En moins de 30 ans, de 1917 à 1941, le pays sortira de son isolationnisme, et ce pour de bon. C’est un nouveau pays, les attaques sous-marines allemandes, le télégramme zimmerman, et surtout Pearl Harbor seront des plaies historiques qui serviront désormais de repères pour tous les Etasuniens. Ce pays n’est plus le même.

Introduction historique pour mieux expliquer les images présentées : les rôles ont été inversés. Les repères ne sont plus les mêmes. Mais que surtout… les valeurs sont les mêmes. Quoi ? Les USA, toujours idéalistes ? Parfaitement. Ils ne manqueront que peu d’occasions pour mettre en avant les droits de l’homme et la liberté démocratique, lors de conférences internationales. L’UE le fait aussi, soit; mais on ne peut pas dire que sa crédibilité soit la même. Surtout pas après le couac énorme d’un certain 29 mai 2005.

Exemple : rencontre avec Vladimir Poutine en février. On suit de près la crise ukrainienne, où se sont affrontés les deux grands. Pourquoi se sont-ils affrontés ? Géo-stratégie avec un parfum de guerre froide, passage pour des oléoducs, ou que sais-je encore ? Bien sûr, on peut TOUJOURS trouver des intérêts. Mêmes minimes. Surtout lorsqu’on parle des USA, qui ont des intérêts dans le monde dans son ensemble. Mais soyons sérieux : valait-il la peine de se confronter à Moscou ? Et durant ce mois de février, lors de la rencontre de Poutine, de renchérir encore ?

President Putin told reporters that Russia had chosen democracy « independently », not because of pressure from outside.

« Any return to totalitarianism would be impossible, » he said.

But he added that democracy must be adapted to Russian conditions, taking into account « our history and our traditions » – and he said that comparing which of the two countries had more or less democracy was « not the right thing to do ».

Mr Bush said: « Democracies always reflect a country’s culture and customs and I know that.

« But they have certain things in common. They have rule of law, and protection of minorities, a free press and a viable political opposition. »

The meeting with Mr Putin was the final event of a European tour aimed at healing divisions over the Iraq war. Mr Bush is now heading back to Washington.

source : BBC

Peu après avoir défié la Russie, qui en tant que premier producteur de pétrole au monde (devant l’incertaine Arabie saoudite) est certainement d’une importance cruciale relativement à l’Ukraine, le président le plus comique que n’aient jamais eu les USA se permet encore des conseils de démocratie. Rien que ça.

Je me fiche savoir pourquoi de telles choses sont réalisées : ce qui m’importe, c’est qu’elles le sont. Elles reflètent l’état d’esprit d’une nation, car on ne peut croire qu’un leader politique est souverain dans le choix de ses décisions, aussi fort soit-il. Ainsi :

The US president has been under pressure from some senior US politicians to make it clear to Mr Putin that his friendship with the US is at risk unless he maintains Russian democracy.

A senior administration official told journalists travelling with Mr Bush that Mr Putin had recently told the US president that the Russian people had a history of strong tsars, and that they were accustomed to government playing a strong role in their lives.

The official said President Bush had rejected that notion. source : BBC

La vérité, c’est qu’aujourd’hui la France est un pays de couards. Ce pays est devenu insignifiant économiquement et militairement. High and low politics ne lui permettent plus d’être parmis les grands. Il n’y a que culturellement, IMHO, que l’Hexagone rayonne. Et c’est parce que c’est devenu un pays de couards que tous se sont réjouis en 2003, lorsque Chirac décidât de ne pas suivre l’allié US. On ne pouvait se contenter à l’époque de simplement dire « non » : il fallait trouver une solution, une réponse à la catastrophe qui s’annonçait. La France produisit un nombre incalculable d’analystes politiques expliquant pourquoi les Etasuniens allaient se planter; mais aucun n’expliquait qu’il fallait trouver des solutions de rechange, et vite.

Si la France avait eu le cran de crier un « non » au Conseil de sécurité, et d’y adjoindre un plan de rechange, il aurait été difficile pour la coallition de fortune réunie autour des USA de s’embarquer dans une telle aventure. La France poltrone, l’Allemagne toujours habitée par son syndrome de culpabilité, on ne pouvait attendre de réponse crédible de ces deux-là. Ils ont été trop content de pouvoir s’appuyer mutuellement l’un sur l’autre, démontrant la justesse de leur choix à la face du monde.

Les USA, dans un rôle que je trouve toujours idéaliste dans leur action au Moyen-Orient, ont joué le rôle de destructeur dans la région. A feu et à sang, l’Irak est aujourd’hui. Ce serait un mensonge d’une mauvaise foi absurde que de prétendre que au moins aujourd’hui, les Irakiens sont libres, et qu’ils sont donc mieux que sous Hussein. Ils meurent en masse aujourd’hui, le chiffre abominable de 1000 morts à cause d’une peur d’attentat le démontre mieux que n’importe quel analyste. On meurt en masse en Irak, et on le savait en 2003.

Les USA pensent qu’ils peuvent changer le monde, mais lorsqu’ils interviennent de leur propre chef, c’est toujours la catastrophe depuis la 2ème GM : la Baie des cochons, le Nicaragua, le Chili, le Vietnam, jusqu’à l’Irak aujourd’hui. L’intervention en Bosnie n’est venue que tard, très tard, et sous la pression des pleutres Européens.

Le grand pays Nord-Américain a toujours été idéaliste, et il est aujourd’hui avec force. N’en déplaise aux adeptes de Kissinger, une politique idéaliste est en marche aux USA, il n’y a pas que les demandes matérielles qui font bouger ce pays. Les Etats-Unis interviennent dans le monde pour des raisons religieuses, pour des raisons altruistes; on ne peut critiquer cela, pas lorsqu’on est démocrate et attachés à la valeur primordiale : la liberté. Mais les moyens utilisés par ce pays doivent être combattus, justement parce que l’on est attaché à la démocratie libérale.

Mais de qui viendra l’opposition ? La Chine ? La Russie ? Je préférerais encore que la Suisse se dote de la bombe atomique. Quoique. Les Suisses doivent être encore plus conservateurs que les Chinois.

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