Jeux d’enfants

Peut-on mourir d’amour ? L’amour est-il si puissant que seule la mort peut réunir les âmes aimées ? Question banale a priori, maintes et maintes fois traité, avec à chaque fois une réponse différente

Yann Samuell répond pour sa part un oui vibrant. Et non pas à travers une histoire d’un amour qui voudrait des déclarations enflammées ou une tendresse débridée, mais plutôt personnifié par des défis que vont se lancer deux enfants, Julien et Sophie.

Tout commence lorsque Julien découvre que sa mère est malade, gangrenée par un cancer. Immédiatement, à la manière d’une « Amélie Poulain », Julien sombre dans un univers rêveur, où seul lui décide de la réalité. La référence est si forte, que Samuell ne peut s’empêcher d’utiliser les techniques et les effets spéciaux qui sont propre au film de Jeunet (mais ce sera la seule ressemblance avec Amélie Poulain). Julien va croiser par hasard sur son chemin Sophie, une Polonaise brimée par ses camarades, et lui offrir son amitié en lui donnant ce qu’il a de plus cher, un boîte métallique offerte par sa mère.

Sophie, loin d’accepter immédiatement la main tendue, va mettre au défi Julien : un déclic se fait entendre, l’engrenage qui les mènera à des actes destructeurs pour eux et pour leur entourage s’est mis en branle. Les « cap, pas cap » vont dorénavant ponctuer leur existence.

Commençant par de banales jeux d’enfants (faire pipi devant le proviseur, dire des gros mots) on voit bien qu’il y a là plus que des enfantillage, mais une vraie passion qui s’élabore entre les deux. On pourra voir ainsi Sophie, lors de l’enterrement de la mère de Julien, chanter « la vie en rose », chanson primordiale dans la vie de Julien (elle lui rappelle sa mère, justement), devant une assistance outrée, pensant certainement que seule la tristesse est de mise à un tel moment. Julien, lui, retrouve le sourire, Sophie étant dorénavant la seule personne sur Terre capable de lui procurer de la joie.

L’âge venant, les jeux continuant, l’amour enfantin doit logiquement déboucher sur une tendresse et un attachement plus adulte. C’est ce que l’on voit émerger à la fin de l’adolescence, lorsque Sophie se décide à se déclarer à Julien. Mais celui-ci, toujours pris dans le jeu, manquant certainement de maturité, ne souhaite que continuer à se lancer des défis avec son amie d’enfance; mal lui en prend, Sophie va finir par le quitter, et l’idylle en gestation s’arrête là.

Julien et Sophie vont grandir, mûrir chacun de son côté, mais l’appétit du jeu ainsi que leur amour va perdurer. C’est à la suite d’un défi lancé quatre ans plus tôt que les deux protagonistes vont se retrouver. Chacun semble avoir changé, Julien s’est embourgeoisé, Sophie devenue aigrie. Mais là encore, Julien va tenter de faire un mal effroyable à Sophie, conditionné par la passion destructrice qui anime leurs rapports. Sophie répliquera de plus belle, ce qui lui vaudra une haine féroce de Julien, prêt à la tuer. Ils se quitteront, et ce pour au moins 10 ans; c’est le nouveau défi.

A nouveau, durant cette longue période, chacun va vivre sa vie, mais qui paraît bien terne, fade sans l’être aimé. Julien va se marier, avoir deux enfants, alors que Sophie se mettra en ménage avec ce qui va devenir (grâce à ses menaces…) un grand joueur de foot. La routine s’installe, mais chacun pense à son âme soeur.

Lorsque le jour fatidique des retrouvailles arrive, une fois écoulées les 10 années du défi, chacun est prêt à tout plaquer pour l’autre; Julien, le soir de son anniversaire de mariage, va abandonner son épouse pour rejoindre Sophie chez elle. Clin d’oeil, il passera devant une marelle, dessinée dans l’allée de la luxueuse villa de son amie.

Le goût du jeu ne les a pas quitté, et va les emmener cette fois-ci à une course-poursuite de Julien avec la police, et l’envoyer à l’hôpital. Quelques farces plus tard, ils décideront, puisqu’ils sont enfin réunis, de ne plus jamais se séparer.

Le meilleur moyen qui s’offre à eux est alors de cimenter leur relation; ils choisissent de se couler dans le béton, acte d’amour que Shakespeare n’aurait pas renié. Pour toute pierre tombale, la fameuse boîte offerte à Julien par sa mère, qui trônera au-dessus de la dalle de béton.

Fin peu commune, mais d’une beauté et d’un réalisme rare. Tout d’abord, un amour aussi fort, basé sur la concurrence (les défis), ne pouvait que se terminer par la violence. Samuell nous montrera ces images de Julien et Sophie vieux, dans un home pour personnes âgées, continuant leurs péripéties d’enfants. Et cela, juste avant de nous montrer la dalle de béton terminé, comme pour bien nous faire comprendre qu’un tel amour ne pouvait se terminer par un happy end hollywoodien. Ancrés dans la réalité, ils savent bien que pour garder leur amour « pur », intact, ils doivent mourir ensemble, ou l’un de leur défi s’en chargerait. Ils décident donc de mourir ensemble, seule fin possible pour une voie empruntée dès leur enfance.

D’autre part, leur amour est tel qu’il ne vit que dans le rêve; Sophie fuyant la pauvreté de sa famille, Julien la mort de sa mère, leur relation n’est qu’un doux songe où eux deux tiennent la place centrale. S’arrêter de jouer, se lancer dans une vie routinière, se marier et avoir des enfants, voilà qui ne pourrait que briser l’univers oniriques des deux tourtereaux.

Parce qu’ils étaient arrivés au bout du chemin, et qu’ils avaient explorés toutes les possibilités offertes par leur style de vie, Julien et Sophie vont, sans un romantisme qu’ils ont refusés toute leur vie, sceller leurs corps à jamais. C’est une mort magnifique, le type de mort qu’on ne pourrait que souhaiter pour soi-même. La mort a rarement un sens, mais si elle peut s’en rapprocher, c’est certainement ici.

Un film très touchant, ne sombrant jamais dans la simplicité, Samuell est resté sur le qui-vive pour éviter de tomber dans la mièvrerie des histoires d’amour dégoulinant; un premier film prometteur d’une série qui se fait déjà attendre.

(message original du 05-10-2003 @ 19:52:43)

Cet article a 9 commentaires

  1. Anonyme

    j’ai 19 ans et vous

  2. Anonyme

    c nullllllllllllll 🙂 🙂 🙂 🙂 🙂

  3. Anonyme

    ررؤءئئيلا لفقبيااس

  4. jcv

    Dans les Corinthiens (2ème partie) 11:2, il est dit : « Je vous ai, en effet, personnellement promis en mariage à un seul mari, pour vous présenter au Christ comme une vierge pure ».

    Il serait malvenu de transgresser une telle règle divine, à moins d’être prête à en payer le prix – la damnation éternelle.

    Et puis Catherine, l’amour, ça va et ça vient, pense à tes enfants que tu risque de perdre. C’est important, ça, les enfants, tu t’en voudrais après une année où deux de fornications, de ne pas les avoir vu grandir.

    Dr Benoît Ruth XVI, diplômé en couplologie millénariste
    Le premier entretien est gratuit, mais les suivant sont payants.

  5. ange

    Je vis cela en ce moment avec une élévation des sentiments, je souffre à en mourir!!! car nous sommes mariés tout les deux avec des enfants et loin de l’autre!mais c’est lui l’amour de ma vie! j’ai trop mal cet amour va me tuer! la passion est peut-etre une épreuve à affronter ou un cadeau du diable! car j’entend des voix et on me dis tu ne céderas pas car tu ferai plus de mal autour de toi que de bien!je suis très catholique!merçi de m’aider,catherine

  6. jcv

    L’amour, c’est comme l’orthographe : ça ne change que très peu entre les générations.

    😆

  7. Anonyme

    vous etes un peu foux cr l’amoure de cette generation c’est pas l’amoure de la premiere generation

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