L’anti-américanisme vu par un Etasunien

Ca fait déjà un petit moment que je me demande comment les Etasuniens peuvent percevoir les vagues d’hostilité européennes et mondiales à leur encontre. Etant plus sensible que de coutume au sujet, j’ai bloqué sur un édito de l’International Herald Tribune (IHT) : « Anti-Americanism is one ‘ism’ that thrives », by Roger Cohen.

Mon édition date du samedi-dimanche 26-27 novembre. Roger Cohen se penche sur les raisons de l’anti-américanisme ambiant. Je reproduis ici certains extraits, puisque l’IHT rend payant ses articles, même si ce n’est que de simples éditos.

Most political « isms » are dead or moribund or past their prime: « totalitarianism, » « communism, » « socialism, » « Marxism, » « fascism. » Humanity paid too high a price for them in the 20th centruy, or simply discarded them, and moved on.
[…]
Whit the demise of the other « isms, », another has gained prominence, to the point where it’s the most virutlent global political idea. I refer to « Anti-Americanism, » an idea espoused and pondered the world over, a kind of background drone from Brazil to Bahrain.
[…]
On the anti-Americanism register, there is also sovereign or nationalist or regional anti-Americanism[…]. « The big ‘O’, or the big other, can be very useful, » said Jan-Werner Mueller, a Princeton polical scientist. « There’s a school of thinking that says if we are building a European identity, we have to build it against something.
And what better to be agains today than America, the hyperposer, the elephant on the word stage, the inescapable country that some Americans call the indispensable nation?
[…]
Yes, there is a further category of anti-Amercianism that blends something of all others. Call it « catchall anti-americanism. »
If you don’t like the market, blame America. If you don’t like modernity, blame America. If you fear open borders, blame America, After all, it must be this restless country that has created such a restless world.
[…]
Research led by Robert Keohane, a professor of international affairs at Princeton, suggests that there is no real impact since 2001 on major U.S. corporations including Coca-Cola, Nike, Pepsi and McDonalds, whose European sales have continued to climb, often at a faster rate than their European competitors. He said « Mr. Big » was not suffering measurable damage.
Anti-Americanism, it seems, often stops where it might hurt: pealple like to inveigh against the United States but then go on buying the same brands and looking for means to send their kids to be educated here. This pervasive « ism » may be more affectation or attitude than ideology.
[…]
A lot of anti-Americanisms are inocuous enough. But some are not. Because if America withdrew from the world, as many people profess to wish, the result would be greater instability and danger – and perhaps a wave of another « ism, » revisionism.

Autant le dire tout de suite, je suis entièrement d’accord avec sa conclusion. Dans l’anti-américanisme ambiant, on perd de vue que l’isolationisme US est pire que tout. On est trop souvent allé chercher la grande nation américaine devant des catastrophes qu’on ne savait pas résoudre. Je ne pense pas aux marroniers que représentent les 1ère et 2nde Guerres Mondiales, mais à quantité d’autres situations où l’Europe était démunie : c’est, exemple parmi tant d’autres, le cas du Kosovo, où seule l’intervention US, via l’OTAN, a permis de stopper Milosevic.
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Arnaque par email : l’enquête

Il m'est venu une drôle d'idée hier : rechercher comment fonctionne le système derrière ces e-mails vous promettant monts et merveilles, des - a priori - attrape-nigauds que tout le monde reçoit dans sa boîte aux lettres. D'habitude ce type de mail - assurant par exemple qu'il suffit d'un tout petit pécule pour toucher des millions - atterit sans un regard à la poubelle. Mais cette fois-ci, j'en ai décidé autrement. Dans le mail en question, c'est une jeune nigérianne…

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Les services publics sont-ils encore nécessaires ?

A l’heure où la Suisse entière s’interroge sur le sort à réserver à Swisscom (opérateur national historique et public du pays), et décider si il faut privatiser ou non l’entreprise, mon interrogation personnelle porte elle sur un point en amont : à force de déblatérer autour du « besoin » d’un service public dans le domaine, s’est-on penché de savoir ce qu’est un service public ? Lorsque j’entends certains discours socialo-marxistes autour du besoin impérieux de garder Swisscom dans le giron étatique, non pas parce qu’elle fait partie des quelques entreprises rentables détenues par l’Etat, mais parce qu’elle serait aujourd’hui soucieuse de ne pas avoir une logique d’actionnariat propre au secteur privé, je me gausse. Ces individus sont soit totalement aveuglés par leur idéologie, soit n’ont jamais fréquenté un service d’Etat, et a fortiori Swisscom.

Pour le cas de Swisscom, il suffit de se rendre auprès de l’un des nombreux shops que possède le géant bleu : le débit doit être assuré, les clients qui posent des questions rapidement expédiés. Le vendeur passe trop de temps avec les clients, trop curieux ? Il se fait blâmer dès que son supérieur s’en apperçoit. Stress, rentabilité, efficacité, les contours du service public mériteraient d’être mis en exergue. Pour l’instant, je n’entends le téléopérateur se réclamer du public que lorsqu’on s’attaque au « dernier miles » (reliquat de sa position de monopoleur historique) : ce sujet pousse les dirigeants de l’entreprise à se draper d’habits de couleur rouge chaude, et à proférer une diatribe quasi-stalinienne. Cependant, hormis la défense de cet avantage particulier, la position est bien plus pragmatique, dirait-on. Tourné vers la rationalisation, devrait-on avoir le courage de dire.

Swisscom n’a à mon sens plus aucun lien avec le service public, et s’offusquer lorsqu’on parle de lâcher l’entreprise aux « chiens du privé » semble, encore une fois, totalement déconnecté de la réalité. Un combat d’arrière-garde. Surtout que, contrairement au domaine de l’énergie (électricité), il n’y a pas de raison d’Etat derrière. Beaucoup d’énergie inutilement gaspillée.

Swisscom est toutefois emblématique de la victoire de la doctrine néo-libérale. Elle s’est diffusée d’autant plus facilement chez Swisscom, qui est une entreprise soumise à la rude concurrence d’un secteur pleinement mondialisé; mais n’y a-t-il aucune répercussion des économies demandées par les « citoyens-contribuables » auprès des autres secteurs du public ?

L’assurance chômage, dans une schizophrénie dysfonctionnelle qui caractérise les services d’Etat suisses, permet l’intervention de la concurrence dans un secteur étatisé. Mais contrairement à l’assurance maladie (emblème de cette schizophrénie), l’Etat est lui-même en concurrence avec le privé. Tout citoyen qui demande à avoir accès à l’assurance chômage se voit proposer, lors de son inscription, un choix parmi diverses caisses de chômage. Ce choix semble peu important, au départ, puisqu’il s’agit d’élire un caisse qui aura le priviliège de payer l’assuré, après avoir calculé ses éventuels droits. Le placement, le contrôle de présence (anciennement le « timbrage »), sont effectués par un service d’Etat, les Offices régionaux de placement (ORP), qui est imposé à l’assuré. Après tout, il est normal que le contrôle soit effectué par les représentants des pouvoirs publics.

Pour le domaine du paiement, où un libre choix est possible, chaque caisse cantonale va subir la concurrence. Ce qui, à n’en pas douter, pousse les cadres de l’Etat, à rationnaliser, à rentabiliser au maximum leurs employés. Délire de gaucho ? Il faut que je partage ici une expérience personnelle. Je me suis rendu auprès de ce service pour entendre qu’on « ne peut pas vous consacrer autant de temps ». Saisi d’angoisse, jettant un oeil suspect alentour, mes oreilles s’étonnaient de ne pas entendre les quelques petites notes de la publicité de Swisscom. Pas autant de temps ?
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Ouvrons le rideau de fumée : fumer dans les lieux publics

Sous l’impulsion d’Yves Bur (UMP), le parlement français aurait pu décider de se doter d’une législation plus précise encore que la loi Evin, vieille de 15 ans mais pourtant déjà suffisante pour interdire la fumée dans les lieux publics. Cette dernière est en effet peu respectée; une nouvelle « loi Bur », qui aurait très vraisemblablement été soutenue par le parti socialiste français, prévoyait en termes lapidaires que

Il est interdit de fumer dans tous les lieux fermés et couverts qui accueillent du public ou qui constituent un lieu de travail, ainsi que dans l’enceinte des établissements d’enseignement et d’éducation

L’UMP, sous l’impulsion de ses idéaux libertaires, mais peut-être aussi sous la pression des lobbies du tabac, n’a pas voulu inscrire cette loi à l’ordre du jour; impossible donc de la voter. Il n’empêche que la gestation d’une telle loi est démarrée, et que l’application stricte de la loi Evin ou l’approbation d’une nouvelle loi Bur n’est qu’une question de temps. Au vu des sondages qui montrent régulièrement un fort soutient parmi la population de l’interdiction, on voit difficilement comment la société française pourrait faire l’économie d’un tel débat au parlement, et l’avorter après discussion. Suivant l’Irlande, l’Italie et la Suède, l’Hexagone serait dès lors le quatrième pays européen à se doter d’une législation « liberticide », a-t-on entendu; dire qu’hier l’Europe riait de « l’extrémisme » new-yorkais. Cette inconsistance par rapport à l’allié étasunien devient une habitude, sur notre continent.

J’avais déjà prévu de me pencher sur l’aspect libertaire de la cigarette, dans un (intéressant mais mal écrit) précédent billet. En effet, je suis assez étonné en général par la tournure que la discussion prend lorsqu’on aborde le sujet de la cigarette : focalisation sur la liberté. Ah, vraiment ? On en est encore là ? La clope, synonyme de liberté, comme les vieilles oldsmobiles dans les années 60 ? Et pourquoi pas les 4×4, aujourd’hui ? Il faut vraiment être accro à la nicotine pour taxer de liberticides des lois qui nous rendraient une certaine liberté; en effet, il y a au moins trois raisons, à mon sens sont primordiales, qui valident une interdiction rassemblant de plus en plus de partisans sous sa bannière en Occident.
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IFPI – un pirate vaut mieux que deux tu l’auras

Il est assez cocasse de constater qu'en ce jour de sommet mondial de l'information à Tunis, l'IFPI décide de lancer sa "plus grande vague d'actions judiciaires contre le partage illégal de fichiers". Si l'on parle de la Tunisie, c'est avant tout parce qu'un (des ?) journaliste occidental a été agressé dans cet Etat aussi transparent que du pétrole brut, et non pas en raison de la main-mise totalement inacceptable des Etats-Unis sur les pilliers d'internet - ce qui était tout…

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ONU, UE, et opérations de maintien de la paix

Il est difficile de passer à côté des relations entre les organisations régionales et les Nations Unies (ONU) lorsqu'on aborde les opérations de maintien de la paix (OMP). Thierry Tardy, directeur de cours au Geneva Centre for Security Policy, présente lors d'une conférence donnée le 10 novembre 2005 à l'Université de Genève, les problèmes actuels de coopération entre l'Union européenne (UE) et l'ONU, tout en restant optimiste sur son avenir. Depuis la fin de la Guerre Froide, l'ONU a multiplié…

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revue de presse blog des émeutes françaises

Quand on veut très fort quelque chose, il suffit d'imaginer très fort qu'on va l'avoir. Cette réplique de série B américaine est en train de s'étendre à la blogsphère (au moins) anglosaxonne. Citant Huntington et son clash des civilisations La théorie de cet auteur repose sur l'idée que le monde est séparé en 7 ou 8 grandes civilisations. Chacune d'entre-elle se doit d'avoir un "Etat phare" (leader), et doit intervenir aussi peu que possible dans les affaires des autres. Les…

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Feu de joie triste, mai 68 est définitivement mort et enterré

Dans une ambiance qui n’a absolument rien à voir avec les émeutes de mai 1968, la France vit depuis 11 nuits les émeutes les plus violentes depuis 35 ans.

Alors qu’on se souvient des étudiants qui montaient aux barricades, qui s’opposaient aux forces de l’ordre en lançant des pavés, en scandant des slogans égalitaristes, aujourd’hui on assiste à une flambée de haine déchaînée par les déshérités des banlieues. Les deux sont parfois comparées dans la presse, est-ce à juste titre ?

Mai 68 était une révolution de bourgeois : ces jeunes voulaient détruire une société sclérosée par son aspect patriarcal. « Tu es jeune, attend que ça passe », disaient les chefs d’une société hautement traditionnaliste. C’était aussi des « tu es femme, trouve un mari et consacre-toi à ton foyer » beaucoup plus définitifs.

Quand on combat pour la liberté d’être un jeune, d’être une femme, c’est une lutte de riche; la panse est suffisamment remplie pour se préoccuper d’autres aspects de sa vie. Est-ce que les banlieues à feu (et à sang ?) ne sont pas de même des combats de bourgeois ?
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