Aujourd’hui se joue un match amical France/Colombie et pour l’occasion l’équipe a publié un article sur le foot colombien. Difficile de changer l’image et les a priori sur le Colombie lorsque même L’Équipe s’en mêle. Même si c’est vrai et j’en parlais déjà vaguement une fois, on aurait surement préférer un article sur les bienfaits du foot pour la réintégration des paramilitaires ou pour aider les jeunes a sortir de routine… enfin à lire quand même…
«Hé ! Fils de p… si tu continues à te mêler de ce qui ne te regarde pas, on va t’envoyer une moto !» Pas besoin d’en dire plus par téléphone. L’allusion aux sicarios, tueurs professionnels, est bien réelle. La menace figure, avec un chapelet d’intimidations, étalé sur quatre pages, dans la plainte contre X, le 25 mai 2006, déposée par Carlos Gonzalez Puche, avocat à la cour et premier défenseur des footballeurs professionnels colombiens. Deux ans plus tard, les appels anonymes nourrissent toujours le quotidien de Puche, lui-même ancien footeux professionnel, dans les années 80, à l’America de Cali et Millonarios, deux des plus prestigieuses équipes de Colombie, jadis aux mains des cartels de la drogue. Du milieu du foot, de ses dirigeants, passés ou actuels, le ”maestro” connaît toutes les combines. Pots de vin, blanchiment d’argent, fausses déclarations, enrichissement illicite, trafic de billets, ventes truquées de joueurs et une série de règlements de compte qui ensanglante jusqu’à l’infini. L’arsenal est vaste. Il ne laisse que peu de latitude aux joueurs, «traités comme du bétail et je suis bien placé pour en parler.» Aussi, quand Mario Yepes (Paris SG) et Ivan Ramiro Cordoba (Inter Milan) lui ont proposé, il y a quatre ans, de devenir le représentant légal de leur profession, régie depuis par une Association en règle (Acolfutpro), Carlos Gonzalez Puche s’est senti obligé d’accepter, «pour défendre nos droits, notre liberté et l’honneur de nous tous.»
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En 2006, Gustavo Upegui, le président de l’Envigado FC, un club de Medellin, impliqué dans des opérations opaques avec les paramilitaires, groupe d’autodéfense d’extrême droite, l’élite du crime organisé en Colombie, a été assassiné. En 2006 encore, Carlos Martan, un dirigeant de la fédération colombienne de football, soupçonné de connexion avec le narcoterrorisme, a été placé sur la liste Clinton, une loi promulguée à l’initiative de l’ancien président des Etats-Unis pour éradiquer le fléau de la coca. En 2007, Eduardo Mendez, le président de Santa Fe, le club doyen du championnat, a été extradé vers les Etats Unis, pour trafic et collusion avec les paramilitaires, ennemis jurés des FARC.
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Le gouvernement a toujours nié la présence des paramilitaires dans le football mais il y a huit mois, il s’est fait clouer le bec. Sur les ondes des radios nationales, les Colombiens ont pu écouter un enregistrement pirate d’une conversation téléphonique entre Rodrigo Tovar, alias ”Jorge 40”, l’un des grands leaders paramilitaires, et un dirigeant du Valledupar FC, un club de Seconde Division. De quoi discutaient les deux hommes ? Jorge 40, extradé lui aussi le 13 mai dernier vers les Etats-Unis, expliquait à son interlocuteur, qu’il pouvait lui «obtenir des joueurs de bon niveau, à un bon prix et à tous les postes, en provenance de l’America de Cali ou du Real Cartagène. Dans le Valle, nous avons les meilleures écoles de formation du pays, tu pourras choisir. Et sur un plan personnel, le Real Cartagène me doit bien ça. Tu auras les joueurs que tu voudras.» L’allusion de Jorge 40, qui fait coucher et lever le soleil au Valledupar FC, n’est pas innocente. Deux ans auparavant, le club de son coeur s’est laissé écraser par le Real Cartagène, encaissant quatre buts dans les cinq dernières minutes pour permettre à ce dernier d’accéder à la Première Division. Le résultat a été validé par la fédération sans sourciller. A la Direction Générale des Stupéfiants, barrio Chapinero, un quartier très populaire, au coeur de la capitale, Carlos Albornoz, le Directeur Général, ne peut nier l’évidence. Mais il assure qu’en Colombie «tout se fait plus lentement qu’ailleurs, que les uns après les autres les hors-la-loi tombent et qu’avec le temps, le pays se porte mieux.»