La Ley de Justicia y Paz

Après l’expérience des négociations du Président Pastrana qui ont malheureusement échoué le Président Uribe est arrivé au pouvoir avec une proposition totalement différente. Tout d’abord la reprise des hostilités contre les FARC avec le but de les anéantir par les armes. Ensuite son gouvernement a fait une proposition de loi pour l’amnistie partielle des groupes armés illégaux, qui devrait permettre la démobilisation de ceux-ci. Cette loi est, en tout cas en théorie, adressée aux paramilitaires comme aux FARC qui ont commis des atrocités telles que la torture, l’enlèvement, le génocide etc. Le but principal, annoncé dans le premier article, est de promouvoir le droit des victimes à  la vérité, la justice et la réparation.

En de nombreux points la loi n’est pas respectueuse du Droit International (DI) comme par exemple lorsqu’elle définit les victimes. La définition inclus les membres de la force publique qui ont souffert de blessures. Le DI Humanitaire considère qu’un soldat blessé au combat n’est pas une victime. Cette loi permet aux militaires de bénéficier des avantages concédés aux victimes. Hormis le droit à  la vérité, la victime a le droit à  la réparation c’est à  dire l’indemnisation, la réhabilitation et la garantie de non répétition des actes.

Ensuite la loi met en place un système de justice transitionnelle pour favoriser la révélation de la vérité. Une audience préliminaire est suivie d’une investigation de 60 jours. Ces 60 jours sont censés permettre à  la police judiciaire de réunir tous les faits. Cela peut paraître insensé car de nombreuses enquêtes durent depuis plusieurs années et aucun résultat ne permet de conclure quoi que ce soit. La loi, telle qu’elle existe, ne permettrait pas aux victimes de connaître la vérité, une nouvelle fois la loi n’est pas conforme avec le DI.

Le thème suivant concerne les peines, elles sont allégées, le but est motiver les groupes illégaux à  déposer les armes. Le maximum autorisé par la loi est 8 ans. De plus il existe la possibilité de faire une peine alternative: c’est à  dire de se compromettre à  contribuer à  sa resocialisation à  travers le travail, les études ou l’enseignement pendant le temps de privation de la liberté et promouvoir les activités orientées à  la démobilisation des groupes armés.

Il existe aussi un devoir de réparation et de restitution. Les membres des groupes armés doivent rendre les biens qu’ils ont obtenus par la force, principalement les terres. Ils doivent aussi payer leurs victimes en guise de réparation. Le problème est qu’ils ont apparemment le droit de payer avec l’argent obtenu illicitement, ce qui peut paraître quelque peu grotesque.

L’autre possibilité pour promouvoir la réparation est la mise en place par l’Etat de programmes de réparations collectives tel que des actes symboliques en mémoire des morts, des monuments ou même des programmes de développement institutionnel pour les municipalités qui ont souffert de la violence. Cela devrait être fait de même que la mise en place d’une commission de réparation et de réconciliation qui devrait être créé d’ici quelques mois.

Cette loi est un exemple de justice transitionnelle, ce n’est pas la première fois dans l’histoire qu’un Etat fait recours à  ce genre de méthode. L’exemple le plus connu est celui de l’Afrique du sud où les commissions de vérité mise en place dans ce pays ont été une réussite, les victimes ont pu connaître leur histoire et les bourreaux ont demandé pardon. C’est un échange, la vérité contre le pardon, qui peut permettre la réconciliation.

Dans le cas de la Colombie il reste encore beaucoup de chemin à  faire mais il faut, c’est presque un devoir, garder espoir.

República Originaria de Bolivia

Le grand rêve d’Evo est changer les règles de son pays, il veut donner la possibilité aux indigènes de vivre dans la dignité, sans avoir l’impression pesante qu’ils se font voler.

Pour cela Evo veut que la Bolivie profite plus des exploitations de gaz, cependant il tient des propos moins radicaux que beaucoup d’autres mouvements indigènes et syndicaux. Il veut accepter la participation étrangère en collaboration avec le gouvernement.

Le fait de vouloir augmenter la participation de l’Etat dans les hydrocarbures n’a rien de très surprenant, car à  chaque fois que les prix augmentent les Etats concernés cherchent à  augmenter leur revenu. Ce n’est pas une idée propre aux pays à  tendance socialistes.

Il aborde aussi le thème de la plantation de coca d’une manière douce. Il veut défendre le droit à  la plantation sans que son pays devienne une plate-forme du narcotrafic. Pour cela il est conscient qu’il a besoin de l’aide américaine. Le résultat d’une politique tolérante de la culture peut être intéressante, on peut espérer un effet de diminution de culture illégale destinée à  la production de drogue. C’est une affaire à  suivre.

Evo admire Chavez et Castro certes, mais il a aussi de nombreux contacts avec Lula du Brésil et Tabaré Và¡squez d’Uruguay. En ajoutant la dépendance de la Bolivie aux financements nord américain on peut largement imaginer Evo suivant les pas d’un Lula, qui est aussi entré dans le monde de la politique par la grande porte, en faisant des annonces fracassantes. Cependant Lula n’a pas suivi les pas de Chavez, la volonté du Brésil d’avoir une place au Conseil de Sécurité a sûrement joué dans ce sens.

Ce qui est sûr c’est qu’Evo est le seul, actuellement, à  posséder suffisamment de légitimité face aux mouvements sociaux de 2003 pour gouverner. Mais il n’a pas beaucoup de temps pour agir; Les entreprises l’accusent de démagogie, de ne pas avoir l’expérience de l’administration. Parmi la gauche on le prévient qu’il doit réaliser les réformes voulues par la masse : c’est à  dire la nationalisation sous peine de perdre l’appui d’une partie de ses troupes. De plus les USA le considèrent comme une menace pour l’équilibre de la région.

Sa tâche va être difficile, mais s’il arrive à  mener à  bout les réformes dont il rêve on devrait pouvoir d’ici quelques années parler de la « Repàºblica Originaria de Bolivia » comme d’un pays stable … ce qui n’est pas arrivé depuis longtemps!

Source

 

 

Evo Morales


Evo Morales, premier président indigène de BolivieIl n’a été qu’une fois au ciné dans sa vie et la dernière fois qu’il a mis une cravate c’était lorsque qu’il était trompettiste, il y a plus de 20 ans. Pourtant Evo, comme il aime apparemment se faire appeler, n’est pas né de la dernière pluie. Il a été berger de lamas, cultivateur de riz puis de coca. Sa première expérience de leader c’était avec une équipe de foot de son quartier. Je ne dis rien de bien nouveau en suggérant ses origines populaires. Très populaire même, 4 de ses frères et soeurs sont morts alors qu’ils n’avaient pas 3 ans.

Il a ensuite suivi ce qu’on appelle une formation continue, a participé à  de nombreuses réunions de syndicats, de nombreux séminaires à  travers toute l’Amérique latine. Petit à  petit, à  force de former des groupes, des syndicats il a été reconnu comme un leader socialiste. Il a su ensuite s’entourer d’académiciens comme Garcà­a Linera, professeur en sciences sociales de l’Université Publique.

Son combat date au minimum du début des années 80. L’imposition du «consensus de Washington» en 1985 a marqué sa carrière politique. Ce fameux consensus du FMI appliqué à  de nombreuses économies en crise crée en Bolivie (comme dans bien d’autres pays) un appauvrissement de la population. Le petit «plus» ajouté par les USA est le financement de la lutte anti-narcotrafic. Par cela, ils entendent la destruction des cultures de coca… et donc la ruine de milliers de paysans, déjà  appauvris par les réformes économiques.

Evo fait alors partie des militants cocaleros. Le slogan des protestations «vive la coca, dehors les gringos» est encore bien connu aujourd’hui.

Les manifestations, qui ne se limitent pas à  défendre la culture de coca, durent mais les privatisations continuent (compagnies pétrolières, télécommunications, système électrique etc.).

Plusieurs violentes confrontations ont lieu, notamment en 1994, 1996 puis en 2000 où la loi martiale fini par être décrétée, mais finalement le gouvernement doit faire marche arrière.

En 2002 les élections présidentielles donnent gagnant le rival d’Evo, mais les élections, bien que très serrées, laissent un goût amer de démocratie sous tutelle: Les USA ont menacé les Boliviens que s’ils votaient pour Evo les différentes aides à  la Bolivie seraient supprimées.

Le gouvernement qui ne représentent pas le peuple et continue avec ses réformes impopulaires et injustes provoque un tel mécontentement qu’une révolution éclate. La police et les travailleurs n’arrivent juste pas à  renverser le gouvernement mais celui-ci perd toutes formes de popularité.

Presque 3 ans plus tard, de nouvelles élections amènent, enfin, un indigène au pouvoir. Fin janvier Mr Bush a, de manière très cordiale, félicité et souhaité bonne chance au nouveau Président de Bolivie. Une semaine plus tard les USA annoncent que leur aide pour la lutte contre le trafic de drogue allait diminuer de 80 millions à  67 millions de dollars.

Il est vrai qu’à  la vue de l’admiration d’Evo pour Chavez et Fidel, les USA ont quelques soucis à  se faire. Cependant si leur but est qu’Evo et son parti optent pour une gauche raisonnable à  la manière du Chili, avec Mme Bachelet, ou du Brésil, avec Lula on pourrait légitimement se demander s’ils suivent une bonne politique pour arriver à  leur fin.

Source : «Evo sin suéter», Gatopardo, Marzo 2006

Manifestons protégés!

La France, pour ne pas changer ses bonnes habitudes, est dans la rue. Les jeunes, les syndicats, et les autres (car tout le monde est invité) manifestent. Ils crient, ils marchent … ils cassent. Bref c’est la fête ! Le seul problème c’est que parfois les CRS sortent, et eux quand ils sortent ils ne sont pas très commodes. Ils cassent aussi, mais ils ne cassent pas les vitrines, ils cassent des têtes.

Comme on est dans un pays bien démocratique on ne va pas interdire de manifester… Ce serait un comble ! Alors on envoie les CRS pour qu’ils tapent et parfois les résultats ne sont pas terribles : Comme ici en Colombie, il y a 2 semaines, un jeune manifestant a succombé à  ses blessures. Il manifestait, certes pas paisiblement, mais il exprimait son désaccord sur la réforme de l’Université Nationale, une des seules universités publiques.

Le problème est qu’il a reçu un coup, ou un lacrymogène (on ne sait pas trop) en pleine tête, et il en est mort.

Alors quelle est la solution ? Soit on ne manifeste plus soit on ne propose plus de réformes qui déplaisent ? Je crois que personne n’a besoin d’explication pour être d’accord qu’aucun des deux n’est possible. Le principe même de la démocratie est de discuter, de ne pas être d’accord, de manifester, de casser et de se faire taper… Où serait le plaisir de vivre dans une démocratie si tout ceci n’existait pas?

Vient alors LA solution : j’ai découvert cela il y a quelques mois à  New York en visitant le MOMA (Museum of Modern Art). L’exposition temporaire du sixième étage était sur le thème de la sécurité : il y avait plein de choses, des gadgets pour la sécurité d’un bébé aux ustensiles de survie pour la montagne, le désert ou en cas de tremblement de terre.

La protectionAu milieu de tout ceci LA chose (voir photo) pour se protéger des coups de la police. Cela ressemble à  une bouée très solide avec une forme de buste et un système pour que tout le monde écoute les battements du coeur. Plus ils sont rapides plus ils sonnent fort. Je ne sais pas encore exactement quelle est l’utilité d’entendre les battements du coeur : effrayer la police avec les bruits ou si leur signaler qu’on est encore en vie et donc qu’ils peuvent continuer à  taper ?

 

 

Il nous reste seulement à  espérer qu’ils commercialisent ce truc très vite, comme ça les jeunes Colombiens pourront reprendre leurs manifestations sans avoir trop peur de la police. Quant aux jeunes Français je suis sûr qu’ils n’en ont pas besoin pour continuer à  manifester mais cela rendrait la police un peu plus inutile et la France un peu plus sûre de ne jamais évoluer…

La Vérité?

Hier je parlais de l’espoir de renforcer la démocratie, aujourd’hui je pourrais seulement ajouter que le chemin va être long, très long.

Comme prévu les amis d’Uribe ont gagné la majorité au Congrès et au Sénat, les surprises viennent plutôt de l’échec de certains candidats. Plusieurs figures connues n’ont pas réussi leur passage (comme deux anciens maires de Bogotà¡), le vote a puni les candidats indépendants. Pour être élu hier il fallait être membre d’un parti !

Les libéraux sont loin d’avoir convaincu, mais il paraît qu’ils sont en train de se restructurer… alors il faut être patient. Le pôle démocratique a progressé, un peu, juste suffisamment pour combler la perte de vitesse des libéraux. Son rôle de parti de l’opposition en est renforcé, et après seulement 4 ans d’existence il doit prouver sa capacité à  être critique et constructif. Il a la possibilité de créer le débat, celui qui m’a tant manqué pendant la campagne !

La guérilla se compte aussi parmi les perdants, elle prétendait saboter les élections, elle a échoué. Bien sûr quelques attentats ont fait des victimes, mais dans les régions où elle a menacé tout le monde, le taux de participation est plus élevé qu’en 2002. La population de ces régions, a pris son courage à  4 mains…

Quant aux paras ils ont à  peu près respecté les pronostics, même s’ils ont privilégié les politiciens traditionnels à  leurs membres. Mais pas de soucis pour eux, ce sont des politiciens « amis », ils ont simplement l’avantage d’être un peu plus crédibles aux yeux de la population.

On pourrait conclure en disant que tout s’est bien passé, comme prévu à  quelques détails près. Mais ce serait oublier le plus important. Comme le font les soi-disant gagnants de ces élections. Quelle légitimité ? Que valent les 70% des sénateurs pro Uribe ? Sans revenir sur les pressions et la corruption on peut simplement regarder la composition des votes : Tout d’abord le taux d’abstention (presque record) est de 60%, 3% de vote blanc (il y avait une case pour voter blanc), 4% des votes ont été annulés, car mal remplis, 1% n’ont pas été rempli du tout.(source)

Ce qui veut dire que les élus ne représentent que 32% des électeurs inscrits !

La légitimité d’Uribe est quelque peu ternie, mais je l’imagine mal analyser ces chiffres et se dire qu’il se trompe sur sa méthode. Car il va sûrement continuer sa politique guerrière, sa libération du marché et sa collaboration avec les US en oubliant que la Colombie a besoin de ses voisins pour se développer… etc.

Mais j’espère surtout qu’il va continuer ses gaffes monumentales telles qu’attaquer les FARC en territoire équatorien, monter de toutes pièces une démobilisation d’une partie des FARC avec des militaires et en récupérant du matériel saisi par l’armée, comme si c’était du cinéma bon marché… J’espère tout ça pour qu’il se plante comme son idole Mr Bush et qu’il retourne faire du cheval dans son ranch pour, peut être enfin, laisser la place à  la justice et la paix dans ce pays !

L’autre possibilité est qu’il devienne fou, je ne sais pas encore ce qui est mieux.

Un Dimanche pas comme les autres

Un dimanche à  Bogotà¡ est toujours un plaisir, le soleil chauffe gentiment et rend nos réveils plus doux. Un petit dej’ bien complet avec des oeufs, du tamal et plein de fruits tropicaux nous permet de récupérer des samedis soir agités et de nous lancer sur la ciclovà­a pour profiter des immenses avenues de la ville, pour une fois sans aucun gaz !

Ce dimanche n’a rien eu de commun avec les précédents. Les élections sont un événement qui ne se prend pas à  la légère :

Pour commencer la gueule de bois était simplement interdite par la loi. Depuis vendredi soir la ley seca interdit toute vente d’alcool, les bars et boîtes de nuit restent fermés tout le week-end.

Ensuite la ciclovà­a n’a pas lieu, tous les efforts sont concentrés pour l’organisation des élections.

Les contrôles à  l’entrée des bus ont doublé, les rues des bureaux de vote sont bouclées et encadrées par des militaires bien armés. Bref l’aspect de la ville est quelque peu transformé pour ce jour si spécial.

Cependant les gens sont détendus et paraissent heureux. Oui heureux d’aller voter. C’est qu’ici, à  Bogotà¡, on ne craint pas les fraudes ni les pressions des groupes armés, alors c’est un jour de fête, de sortie en famille…

En arrivant au bureau de vote central (pour les personnes qui ne se sont pas inscrites dans leur quartier) j’aperçois la plus longue file d’attente jamais vue dans ma vie !

Les gens, bien alignés, plus ou moins deux par deux, forment une ligne d’au moins 600 mètres, c’est vraiment impressionnant !

Mais cela avance très vite, les postes sont répartis par numéro de carte d’identité et tout le monde sait où aller … La queue était juste pour la fouille à  l’entrée du site.

En fait c’est très clair et très bien organisé, selon mes informateurs, car moi je dois rester dehors, seul les électeurs ont le droit d’entrer !

La journée se passe et les bureaux ferment à  16h, les résultats sont annoncés au fur et à  mesure du dépouillement … la tension au sein des partis doit être forte !

Et, hormis les départements dont j’ai parlé dans mon article précédent (qui ne représentent qu’un tiers du pays), il existe beaucoup d’espoir. L’enjeu est grand pour le pôle démocratique et les libéraux, car même si on sait déjà  qu’Uribe va être majoritaire au Sénat et au Congrès, le but de ces deux partis est de faire avancer la démocratie, de la consolider…

Demain, lundi, est le jour de la vérité.

Le Jour J

à‡a y est! C’est parti! Ce dimanche c’est les élections!

Grand moment pour la Colombie, grand moment pour moi aussi car c’est les premières élections que je vais suivre en direct. Les contrôles se sont intensifiés, les affiches et hommes sandwichs pullulent. Les publicités télévisées s’enchaînent.

Mais étrangement il me semble que le débat politique est le grand absent de ces élections. Ayant l’habitude d’assister à  des débats d’idées (plus ou moins) de nos campagnes électorales européennes je suis passablement surpris des sujets discutés ici. On entend parler que de réforme du congrès ou de corruption. Plusieurs journalistes s’époumonent en dénonçant les pressions des groupes armés, quelques candidats se risquent à  le faire, mais la majorité continue en proposant de “reconstruire” la Colombie…

Alors ma question est simple: comment? Pour avoir une réponse j’ai dû aller à  un meeting d’un parti. Une réunion bien fermée (moins de 100 personnes) où une candidate nous explique son programme. Elle aborde plusieurs thèmes et elle a beaucoup d’idées: réforme agraire, droits humains … etc. C’est très intéressant. Mais alors pourquoi en public, à  la télé on n’assiste pas à  ce genre de chose?

Une seule réponse me vient à  l’esprit: sur la vingtaine partis en compétition, 6 ou 7 sont importants. De ces partis, qui peuvent lancer un débat, seul 2 sont contre le président actuel (Uribe). Seul 2 s’opposent à  la réélection. Les libéraux et le pôle démocratique. Le problème qu’ils ont est qu’ils ne peuvent pas aborder des thèmes trop à  gauche, de peur d’être accusé de guérilleros. Le résultat électoral qui s’en suivrait, serait alors catastrophique.

Comme je l’ai déjà  mentionné, les FARC ne font pas avancer le débat…

Cependant je parle ici de Bogotà¡, la “zone libre” avec le centre du pays … alors imaginez les zones où sont présents les groupes armés. Un petit tour d’horizon des départements concernés, une zone (au sud du pays) contrôlée par les FARC et l’autre (tout le nord du pays) contrôlée par les “ex” paras, nous donne une idée de ce que peuvent être les élections en Colombie :

Zone FARC :

Caquetà¡: il est impossible de faire campagne en campagne. Les FARC l’ont interdit. Le seul lieu ou la les candidat ont pu se déplacer est la capitale Florencia.

Guaviare : dans ce département les FARC ont interdit aux candidats de s’inscrire… Actuellement les militaires ont repris la capitale, mais il est difficile de faire de la politique avec la menace des paramilitaires encore présents, et des FARC qui tentent de récupérer leur territoire.

Zone “ex” Paramilitaire :

Santander: apparemment il n’y a pas de pression directe, cependant les campagnes des partis proches des paras ont un budget démesuré.

Norte de Santander: grosse présence de groupes armés. La population a demandé qu’on ne marque pas l’index avec l’encre indélébile, comme il se doit, pour éviter des représailles.

Antioqua: région avec un passé de violence politique, les paras ont déjà  tué plusieurs politiciens. Mais avec la démobilisation plusieurs leaders paras sont entrés en politique et il est possible de les retrouver sur certaines listes pour la ville de Medellin.

Cordoba: c’est une des régions mères du paramilitarisme … d’après Semana, les leaders para décident et dirigent tout. Dans cette région il n’y a presque pas de candidat de gauche.

Bolivar: Cartagena (la capitale) rime avec corruption, clientélisme, alliances familiales… le candidat principal est le fils de la « gérante » du département. La Dame décide tout, la drogue, le business, les paras … D’autres candidats ? Non la dame ne veut pas trop.

Cesar: Les paras se sont démobilisés. Comme dans les précédents départements mais là  elle à  l’air plus effective. Le parti de gauche peut faire campagne et apparemment ça marche. Ils craignent bien sûr les représailles mais, pour l’instant, rien de concret.

Magdalena: lors des dernières votations le candidat de la droite conservatrice a obtenu 90% des votes. La démobilisation devrait permettre cette fois des élections un peu plus libre. Mais les gens ont peur d’aller voter car les paras maîtrise les bureaux de vote. Donc les élections 2006 ne seront pas très différentes des précédentes. Il y aura juste plus d’un candidat…

Atlà¡ntico: Barranquilla, c’est l’autre paradis du clientélisme et des fraudes : une enquête a montré des irrégularités concernant 63% des cartes d’identités enregistrées.

L’avantage est que les résultats, dans ces régions, sont connus d’avance. Il reste cependant tous les autres départements et là  il est possible de rêver d’une nette avancée des partis plus démocratique. Les libéraux ont de bonne chance d’augmenter leurs nombres d’élus et on espère que le pôle démocratique gagne un peu de terrain. Ensuite, on s’attend, ou on espère, une alliance de ces deux partis pour les présidentielles, qui auront lieu dans 2 mois, avec comme but d’emmener le “seigneur” Uribe au 2e tour.

Ce serait déjà  une victoire.

 

Source

Le périple divin de l’émeraude

La légende nous suggère que l’El Dorado se trouve en Colombie, et c’est une des grandes raisons pour laquelle je suis presque sûr de retrouver, un jour, une trace de Corto Maltese dans ce pays. (cf intro)

Mais pour attirer ce marin de légende, la Colombie possède d’autres atouts. Une motivation pourrait être la guérilla (on l’a déjà  vu en soutenir une, cf Tango) mais en regardant la tournure que celle-ci a pris, j’ai quelques doutes. Il y a l’or aussi, mais les mines s’épuisent par ici. De plus leur intérêt n’a jamais été vraiment fabuleux. Par contre l’émeraude est largement à  la hauteur de notre homme. Et la Colombie est le pays par excellence de ce bijou, qui nous rappelle la profondeur de la nature, puisque c’est ici qu’on trouve les plus belles et les plus grosses.

A travers l’histoire cette pierre a toujours provoqué une grande fascination, les anciens Incas et les Aztèques la vénéraient comme pierre sacrée. Ce joyau aurait une provenance divine:

Pour certains il s’agirait d’une pierre tombée du Ciel (lapis e coeli). Il est apparemment d’usage de relier cette lapis e coeli au célèbre et énigmatique épisode de la Bible tiré des prophéties d’Isaïe:

“14:12 Comment es-tu tombé du ciel, Astre brillant, Fils de l’Aurore? Comment as-tu été précipité à  terre…”

D’autres pour des raisons assez obscures, la prétendent adressée à  l’Ange déchu, Lucifer porteur initial de la Lumière Divine. Dans sa chute, l’Émeraude qu’il portait à  son front, symbole et signe de son dépôt, serait tombée sur le sol, en signe de déchéance. Les anges, non rebelles, l’auraient reprise et emportée au Ciel.

Finalement Richard Wagner dans son récit Lohengrin ne parle plus de l’Émeraude tombée du front de Lucifer qui est rapportée par les anges sur terre, mais bien la Coupe précieuse qui servit au Christ, le Graal:

Dans un pays lointain, inaccessible à  vos pas, se trouve un château nommé “Montsalvat”; un temple lumineux se dresse en son milieu, si précieux que sur Terre, rien de tel n’est connu; à  l’intérieur, un vase doté d’un pouvoir miraculeux y est gardé comme le Saint des Saints; pour être confié aux soins des plus purs parmi les hommes, il fut apporté par une troupe d’anges; chaque année, du ciel s’approche une colombe, pour fortifier de nouveau sa vertu miraculeuse.”

Corto est bien capable de venir dans ce pays lointain, pour affronter la troupe d’anges et tenter l’entrée dans “Montsalvat”. Il admirerait simplement le temple lumineux, pour ensuite entrer dans le jardin de Dieu, l’éternel printemps, et voir ce vert, vif, intense et profond qu’est l’émeraude.

L’analyse biblique de l’émeraude se poursuit et nous amène à  la comparaison entre Lucifer, porteur de lumière, et Prométhée, voleur du Feu des dieux. Alors se pose la question “Lucifer avait-il volé la Lumière pour la donner aux hommes?”

Je suis convaincu, à  nouveau, que la question pourrait préoccuper notre marin. Tout au moins pour justifier certains de ses actes ou amis. Même le diable serait capable d’aider l’humanité! Alors imaginez Raspoutine!

Il faut aussi penser que notre gentilhomme de fortune n’est point fou: une émeraude, qu’elle provienne de Lucifer ou non, peut valoir des millions de dollars. Alors pourquoi se priver d’une aventure enrichissante!

Bien sûr une telle entreprise ne s’improvise pas, il lui faut connaître les différentes réincarnations de la lumière de Lucifer à  travers l’histoire. La route de notre marin a dû être longue, car les premières émeraudes proviennent de l’époque des Pharaons égyptiens (3000-1500 avant notre ère) mais leur mines étaient déjà  épuisées quand elles furent redécouvertes. Ensuite, on retrouve la trace de l’émeraude dans les anciennes écritures sacrées de l’hindouisme. Elles étaient fort prisées pour leur pouvoir de guérison.

Apportaient-elles la protection de Lucifer?

 

C’est à  ce moment qu’apparaît l’une des plus grandes émeraudes du monde dite “du Grand Moghols”. Découverte en 1695, elle pèse 217,80 carats et mesure environ 10 cm. de haut. L’une de ses faces est couverte de textes de prières. Une autre comporte des ornementations florales foisonnantes, gravées dans la matière.

La couleur verte de cette semi divinité est aussi un symbole, que ce soit dans la Rome antique où c’était la couleur de Venus, déesse de l’amour et de la beauté, ou pour l’Islam où elle symbolise l’unité de leur religion.

 

D’un point de vue plus terrien (ou marin) l’émeraude est un silicate de béryllium et d’aluminium. Elle fait partie de la famille des béryls. Cependant le béryl pur n’a aucune coloration. La couleur n’apparaît que lorsque des traces de certains éléments s’ajoutent au processus d’élaboration. L’émeraude gagne sa couleur grâce aux traces de chrome.
De manière générale, ces éléments sont concentrés dans l’écorce terrestre à  des endroits complètement différents de ceux où se trouve le béryllium, de telle sorte qu’il ne devrait pas du tout exister d’émeraude!
Toutefois, au cours de bouleversements tectoniques d’importance extrême, ces éléments antinomiques ont été mis en contact. Le processus de cristallisation est dû à  des températures extrêmement élevées et à  des pressions gigantesques.

 

Lucifer interviendrait-il pour retrouver son bien?

 

On trouve la trace de ces forces immenses dans le coeur même de cette pierre. Ce processus impressionnant et brutal qui contribue à  la création de cette beauté incomparable laisse des traces: des fissures plus ou moins apparentes, un mini-cristal ou une petite bulle…

Connaissant tout cela il reste une question en suspend: Pourquoi la Colombie et pourquoi Bogotà¡? Tout d’abord, comme je l’ai dit plus haut la Colombie produit les plus grosses et les plus belles émeraudes, ensuite les gisements les plus important se situent dans un périmètre de 100 kilomètres autour de Bogotà¡. Alors comme pied à  terre Bogotà¡ est le lieu parfait. Corto ne peut être qu’ici!

Pour l’explication divine cliquez ICI

Pour l’explication scientifique cliquez ICI

Dans la Jungle

La Colombie détient un record: celui du nombre de séquestrés. Bien sûr on pourrait rêver d’une meilleure publicité pour un pays si diversifié. Jusqu’en 1999 la moyenne atteignait environ 3000 enlèvements par année et actuellement on compte un peu plus de 5000 détenus. Les FARC n’en détiennent “que” 2000, la pression politique est une des causes, la rançon en est une autre. Les 3000 autres, sont détenus sans que l’on sache par qui (source).

Ingrid Betancourt fait partie de ces statistiques froides que je viens de citer. Elle a été enlevée, avec sa directrice de campagne, le 23 février 2002… il y a un peu plus de 4 ans.

Son histoire a largement été médiatisée, principalement en France. En partie car elle a été mariée avec un français, mais aussi parce qu’elle a toujours été proche des élites colombiennes et françaises. Son père a été ministre, sa mère sénatrice, Dominique de Villepin était un compagnon d’uni, …etc.

Les médias français la présentent facilement comme une sauveuse, l’unique à  se battre contre la corruption de ce pays. Même Renaud a écrit une chanson pour elle (“Dans la Jungle“) où il la décrit comme la seule à  lutter contre le double ennemi fasciste (Uribe et les FARC).

Il faut dire qu’elle-même se présente comme cela dans son dernier livre, la rabia en el corazà³n. Elle décrit son combat, d’abord au Congrès puis au Sénat, contre les politiciens corrompus des partis traditionnels. Il est vrai qu’elle s’est engagée corps et âme dans ce combat (discours, campagne, grève de la faim,…) qu’elle a risqué sa vie, détruit l’unité (physique) de sa famille. Cependant l’objectivité des médias français laisse parfois penseur. Au point où plusieurs se fâchent. La preuve en est le livre de Jacques Thomet: “Ingrid Betancourt: histoire de coeur ou raison d’Etat”. Ce journaliste accuse le gouvernement français de manipuler la presse et l’opinion publique, de détruire l’image de la France en Colombie et de détériorer les relations franco-colombiennes. Selon lui, la France aurait perdu des contrats équivalents à  700 millions de dollars. Tout ça pour libérer Ingrid.

Du côté colombien aussi, on peut voir certains s’en prendre à  la Ingridmania française. Une journaliste de El Tiempo le montre très bien :

C’est que personne n’a dit aux Français que beaucoup d’autres sont depuis plus de 7 ans dans la forêt. Aussi l’histoire de la Franco-Colombienne Aïda Duvaltier, enlevée en 2001 par l’EPL [Armée populaire de libération, maoïste] et dont les restes furent découverts la semaine dernière, n’a-t-elle provoqué aucune réaction massive de ses compatriotes. Et la mort du major Julian Guevara aux mains des FARC [séquestré depuis 1998, il est décédé le 28 janvier dernier] n’a même pas été commentée en France.” (El Tiempo – Article publié le 21 février 2006 traduit par : Latin reporter)

Certes… il est un peu dur d’expliquer pourquoi la France ne réagit pas plus…

Cependant il faut aussi savoir qu’Ingrid a quelque peu secoué la classe politique colombienne, et de la même manière que le gouvernement français influence la presse Française, le gouvernement Colombien le fait avec la presse colombienne.

Alors Ingrid est-elle la Jeanne d’Arc des Andes ? Est-elle juste la copine de Villepin qui coûte très cher à  la France ?

Peut-être les deux à  la fois, mais en étant pragmatique on pourrait simplement penser qu’au moins, grâce à  elle, la France se mobilise pour un sujet d’une importance fondamentale pour la Colombie.

Transmilenio

Un bus, de toutes les couleurs, dévale la pente à  toute allure, il est poursuivi par un gigantesque nuage de poussière. La route est étroite et sinueuse, elle paraît interminable. Le bus est rempli à  craquer, les gens s’accrochent comme ils peuvent aux barres d’acier, qui elles-mêmes ont du mal à  rester fixées au plafond. Sur le toit, les valises côtoient les sacs de patates et les chèvres, le tout est amarré sommairement. La musique est à  plein volume, tellement fort que le son devient inaudible, les gens doivent crier pour tenter de discuter … C’est un peu une boîte de nuit sur roues, avec un inconscient au volant. On a le coeur qui palpite, de joie ou de peur. L’aventure sud-américaine bat son plein…

Si cela vous fait rêver, Bogotà¡ ne sera qu’une étape car ce n’est pas ici que vous trouverez ce fameux cliché.

Bogotà¡ est une métropole, ses 6,5 millions d’habitants se déplacent majoritairement en bus, mais les chèvres sur le toit et la musique à  fond sont des variables d’un autre temps. La ville a doté ses habitants d’un système de transport relativement moderne. Il fonctionne comme un métro : c’est-à -dire qu’on paye à  l’entrée et ensuite il existe un réseau avec différentes stations et lignes qui s’entrecroisent. Simplement ce n’est pas un métro, ni un train, … mais un bus. Les bus sont exactement les mêmes qu’on trouve à  Genève ou à  Paris. Tout beaux, tout neufs et les utilisateurs en prennent bien soin. C’est leur Transmilenio!

TransmilenioIl a été créé dans le but de diminuer le niveau de pollution de la ville et fait partie d’un programme du protocole de Kyoto. Il faut dire que l’ancien système (qui existe encore dans certains quartiers) n’était pas des plus écolo. C’était une série de petits bus, cars ou vans super vieux et qui crachaient un monstrueux nuage de fumée noire …

Les seules différences, qui peuvent surprendre le touriste, résident dans les éléments qui entourent ces bus. Tout d’abord, à  chaque entrée, il y a un ou deux militaires qui surveillent et fouillent éventuellement les sacs. Mais pour quelqu’un qui passe plus de deux semaines en Colombie cela devient vite normal, à  chaque fois qu’on entre dans un bar, un centre commercial ou un bâtiment public on passe par cette étape.

Ensuite l’entrée et la sortie du bus est une épopée : le service n’est pas encore tout à  fait suffisamment développé, alors il manque parfois un peu de place. Les gens s’emboutissent souvent sans laisser l’opportunité à  ceux qui désirent sortir de réaliser leur souhait.

Un certain nombre de publicités tentent d’expliquer qu’il est préférable de laisser sortir les autres avant de monter à  bord … je crois que cela devrait arriver le jour où il y aura suffisamment de bus.

Pour l’instant on parle de Transmi lleno* et moi ça me fait bien rire !

*lleno veut dire plein, en espagnol

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