à la conquête de la Terre de feu

Après la traversée en bateau nous arrivons à  Porvenir, un petit village mignon, mais on ne fait presque pas attention à  ce qui nous entoure. Cela fait à  peine une semaine que j’ai retrouvé mon frère, et après plusieurs mois de voyage je suis juste content de discuter avec lui, de manger du fromage et du chocolat. Alors on quitte Porvenir le jour même, nos gros sac sur le dos, de quoi se nourrir pour 3 ou 4 jours et plein d’énergie et de motivation. Nous partons à  pied, une carte en main, à  la conquête de la Terre de Feu et sûr de notre coup. Après quelques heures de marche nous décidons de planter la tente et de profiter de ce paysage incroyable, sans arbre, vallonné où trottent plein de bébêtes.

Le soir on se cuisine une bonne platée de pâtes, un lac à  nos pieds nous sert de source. Nous regardons ensuite le tardif couché du soleil et nous admirons quelques instants le ciel étoilé avant de sombrer dans un sommeil profond. Tout est parfait.

Le réveil est un peu plus dur, le thé avec l’eau du lac a un sérieux goût de sel. Un blague qui nous fait pas vraiment rire, nos stocks d’eau sont très limité et si nous ne trouvons pas de sources nous risquons d’avoir des problèmes. Pourtant en Patagonie l’eau ne devait pas être un souci…

Malgré tout, nous décidons de reprendre notre route, à  chaque lac on vérifie le goût de l’eau. A chaque fois le même dégoût, ce n’est franchement pas agréable. Le temps passe et la première voiture que nous voyons en deux jours nous prend en stop. Sur 10 kilomètres, rien de transcendant. Selon la carte que nous avons, nous sommes à  une centaine de kilomètres de notre but. Sans eau ça va être dur. Un autre voiture nous avance dix de plus. Mais là  c’est le drame, on apprend que la prochaine ville n’est pas à  cents mais trois cent kilomètres (un peu moins en réalité). La question n’est plus seulement celle de l’eau, mais aussi celle de la bouffe, du temps etc.

On ne sait pas vraiment quoi faire alors on continue à  marcher, espérant une solution miracle, en se regardant comme deux cons, avec notre carte pourrie. Sans se le dire nous pensons tous les deux la même chose… bordel de merde! C’est la deuxième fois qu’on se fait avoir comme des bleus pour une histoire de saloperie de carte. On n’a pas appris!

Mais finalement le miracle arrive assez vite, on a toujours de la chance quant on voyage. Un nuage de poussière arrive à  mille l’heure, le bus qui passe deux fois par semaine fonce sur la piste. Sans réfléchir on se met au milieu les bras en l’air pour lui faire des signes, et même si au dernier moment on se rabattra sur le bas côté (imaginez si les freins étaient pourris!), nous étions bien décidé à  stopper ce bus. Bien logiquement il est plein, mais le chauffeur nous propose le couloir à  moitié prix. Sans hésiter on accepte. Nous retrouvons nos compagnons de traversée qui eux sont restés à  Porvenir pour attendre le bus qu’ils avaient réservé deux ou trois jours avant!

Quelques heures plus tard, après avoir passé la douane, descendu et remonter dans le bus pour éviter le terminal de Rio Grande, nous arrivons à  Ushuaia.

El fin del mundo.

Une histoire qui ne devrait plus se reproduire

Martha Loay, une femme de 37 ans est morte d’un cancer. Jusque là  son histoire n’a malheureusement rien d’exceptionnelle. Mais voilà , elle était malade d’un cancer relativement bénin, ou plutôt complètement soignable. Alors pourquoi? Pourquoi laisse-t-elle quatre filles de 3 à  18 ans seules?

L’histoire débute au moment où elle tombe enceinte pour la quatrième fois, les médecins lui découvrent un cancer du col de l’utérus. Mais voilà , pour pouvoir la soigner il faut qu’elle avorte.

Ciel, non… un avortement, c’est un péché.

Les lois colombiennes, interdisaient l’avortement jusqu’à  la décision de la cour suprême l’année dernière le 10 mai 2006. Enfin, les colombiennes peuvent avorter dans certain cas, enfin elles ne sont plus obligée de mourir parce qu’elle sont tombé enceinte par accident ou parce qu’elles se sont fait violées. Ce jour là , le 10 mai 2006, Martha, malgré qu’elle sache que pour elle c’était trop tard, fut très heureuse. Elle annonçait avec soulagement “enfin la court a compris”

Si son application reste encore très compliquée, on peut aujourd’hui espérer que cette femme est la dernière à  mourir pour ne pas avoir pu avorter.

Un mauvais expat?

Clément m’a gentiment mis dans une liste pour faire une chaîne… Moi je n’aime pas les chaînes, sauf celles en or autour de mon cou que je mets avec ma chemise blanche à  moitié ouverte et mes cheveux collés. Mais bon, il me met le couteau sous la gorge et je me vois mal avoir de nouveaux problèmes avec la mafia de blogueurs français en argentine. Alors voilà , selon la coutume je dois la transmettre, je choisis Sandrine parce que j’ai envie de savoir combien de litre de Guinness elle boit au petit déjeuner et Guillaume pour connaître ses relations avec les coiffeurs argentins…

Je l’enverrai bien aussi à  Patxi, parce qu’il est expatrié dans sa tête mais je ne sais pas si ça vaut. Sinon ça m’intéresserai de savoir comment vit l’expatriation Tonton Patrick … mais je suis presque sûr qu’il m’enverrai … en altitude!

… maintenant faut répondre aux questions… zut!

Etes-vous déjà  allé chez le dentiste dans votre pays d’expatriation ?

Oui, plusieurs fois… je me suis même fait arracher une dent. Un bon gars, sympa et tout.

Fantasmez-vous encore aux filles/hommes de votre pays d’origine?

Bof, j’ai toujours préféré ma femme.

Etes-vous inscrit sur la liste électorale du consulat le plus proche?

Oui… mais mon vote utile n’a servi à  rien.

Regardez-vous TV5?

Non, j’aime pas la télé

Avez-vous besoin d’un steak-frites par semaine?

Non, je ne mange que des patacon et des empanadas.

Avez-vous des difficultés chez le coiffeur de votre pays d’expatriation?

Non, très sympa aussi, comme le dentiste.

Parlez-vous la langue de votre pays d’expatriation?

Oui… surtout les gros mots.

[Là  je saute une série de questions, parce que transatlantique]

Ramenez-vous forcément un fromage de France?

à‡a c’est sûr… tout ce que je peux, et même s’il faut je fait des boulettes, et les mettre dans du plastique (genre capote) et les avaler… pour pouvoir les récupérer après. Faut pas croire que la technique de la mule ça marche qu’avec la coke.

Quand vous rentrez en France, vous sentez-vous Français?

à‡a tristement non, mais ça presque toujours été comme ça. En France j’ai toujours été un ouin-ouin (suisse) et ailleurs j’ai toujours été frouz (français)… surtout en Suisse.

Fuyez vous en voyant la police locale?

Non… en général c’est des gosses de 18 ans, ils n’arrivent pas a tenir leur matraque, passe leur temps à  se péter les boutons, bref ils ne font pas trop peur.

Regrettez-vous les apéritifs en terrasse?

On en fait régulièrement … au rhum de préférence. Et de temps en temps un petit rouge, mais ça c’est quand on est fatigué, par exemple lorsqu’il y a plusieurs jours de congé à  la suite!

Avez-vous changé vos habitudes concernant le petit déjeuner ?

Les habitudes en tant que tel non, par contre mon café est vachement meilleur qu’avant… du coup j’en bois beaucoup plus. Pareil avec les jus de fruit. Avant c’était jus d’orange en brique (sauf pendant les 2 mois d’hiver où on avait droit à  des oranges pour de vrai) alors que maintenant c’est jus d’orange, de lulo, de maracuya, avec des granadillas, des mangues et des papayes.

Et bien sûr le dimanche avec les oeufs, les arepas, la salade de fruit on ajoute parfois un tamal et un caldo quand la fête a duré longtemps.

Laisser vous tomber les bonnes manières de votre pays d’origine pour vous adapter à  celles de votre pays d’accueil?

C’est quoi les bonne manière française???

Quelle attitude de votre pays d’expatriation espérez-vous garder?

Les horaires…. Et le “Quiubo guevon, que mas marica” pour dire bonjour aux potes (pour les colombien qui me lisent … oui oui, je traîne avec des gomelo des universités privées, mais j’assume!)

Quelle attitude de votre pays d’expatriation espérez-vous ne jamais prendre?

Le machisme … mouais parce que c’est moche!

 

Voilà  je crois que j’ai fini… du coup j’ai plus rien à  dire, il faut que j’aille bosser, je suis en retard (comme d’hab, c’est pour ça que j’aime bien les horaires colombiens).

 

 

San andres et providencia à la CIJ!

En 1928 La Colombie et le Nicaragua ont signé un traité délimitant les frontières maritimes de ces deux pays. Ce traité défini légalement la situation des îles de San Andres, Providencia et Santa Catalina qui sont située à  quelques kilomètres des côtes du Nicaragua et à  presque 500 kilomètres des côtes colombiennes. A ce moment la Colombie hérite de manière assez logique de cet archipel. De “manière assez logique” dans le sens où déjà  avant l’indépendance sudaméricaine ces îles faisaient partie de la couronne espagnole attachée à  ce qui est maintenant la Colombie. Au moment de l’indépendance et de la création de la “Gran Colombia” par Simon Bolivar ces îles continuèrent à  faire partie de l’aventure et finalement elles restèrent attachée à  la Colombie malgré l’échec du projet de Bolivar.

Mais voilà  à  cette époque le droit maritime est tout frais, de nombreux traités sont signés. Mais celui la ne respecte pas vraiment les normes en vigueur, ni même la logique géographique. Alors le Nicaragua a décidé de faire appel à  la Cour International de Justice (CIJ) pour réclamer ce qui selon lui doit lui revenir de droit. En ce moment la Cour est en train de se charger du problème. La Colombie défendant bien logiquement son “bien”. La première idée est bien sûr dire que le Nicaragua a signé un traité. C’est vrai, mais entre 1927 et 1934 le Nicaragua était occupé par les Etats-Unis. Alors il est facile de dire (et de démontrer) que le traité a été signé sous la pression d’un tiers. Ce qui, selon le droit des traités (Convention de Vienne sur le droit des traités1969) est une raison pour rendre nul le traité.

Mais pour l’instant la Colombie mise sur la non compétence de la CIJ. La Cour est en train de délibérer, en attendant patiemment le résultat  je me suis dis qu’il était grand temps que d’aller connaître ces petites îles. L’excuse est toute trouvée, il me faut un reportage sur place pour mon blog, sinon ça ne fait pas du tout sérieux. Alors en juillet c’est sûr, je vais y faire un tour. J’ai déjà  réservé les billets!

Les fantômes de Bogotá

CandelariaLa vieille ville de Bogotà¡, le quartier de la Candelaria, est célèbre pour ses vielles maisons coloniales. Un patrimoine absolument magnifique et source d’histoire à  dormir debout. Les habitants de ce quartier en racontent facilement quelques unes, et pour ceux qui prennent vraiment le temps de partir à  leur recherche pourront découvrir quelques perles. Les aventures des premières années de la “fugue” (( elle a été volée par le M19 )) de l’épée de Simon Bolivar est une de mes préférées. Surtout si l’on pense que maintenant beaucoup prétendent que Chavez la conserve précieusement.
Mais la grande majorité des histoires sont relative aux nombreux fantômes qui cohabitent avec les propriétaires de toutes ces maisons. Que se soit dans les anciens bâtiments du DAS, où de nombreuses années de tortures ont marqué les murs de l’édifice reconverti en appartement, ou dans des maisons de plus de 3 siècles, les morts ont toujours des anecdotes à  nous conter ou nous faire comprendre.
Dans le cerveau européen ce n’est pas toujours facile de faire cohabiter ces “faits” étranges avec le scientisme dans lequel nous avons grandi mais ici l’acception des fantômes est complète. A tel point que même El Tiempo consacre un article pour nous expliquer les derniers évènements. Une cérémonie pour la nomination d’un nouveau recteur a pris beaucoup de retard car un fantôme aurait caché les documents nécessaires. Des historiens reconnus ont même fait une recherche pour savoir qui habitaient cette université.
Dans le même ordres d’idée dernièrement une vidéo a été filmée dans un appartement par une personne qui essayait sa nouvelle caméra, on peut admirer une étrange apparition d’une jeune fille… une petite frayeur pour le caméraman, un vrai plaisir pour nous:

[youtube]http://www.youtube.com/watch?v=xhYJuRCdns0[/youtube]

décidément son ” ay ijueputa… que es eso… mierda… no me joda ijueputa vengan … ojo!!!!” me fait mourir de rire

adios glacier, adios

Les souvenirs de voyage sont presque toujours des souvenirs de moments positifs qui rendent nostalgique, nostalgique d’une époque, d’un bon moment. Rarement ce sont des souvenirs tristes, voire même des échecs douloureux. Etrangement le cerveau fait le ménage, où simplement transforme le souvenir difficile en moment où l’on a appris quelque chose.

Cette logique, que je n’imagine pas m’être personnelle a eu une faille il y a quelque temps. Etrangement mon cerveau a transformé un agréable souvenir en un questionnement affligeant.

C’était il y a un peu moins de dix ans, en Bolivie, à  la La Paz pour être précis. J’avais l’adresse d’un centre de guide de montagne qui collaborait avec l’école de guide de Chamonix. En tant qu’amateur d’alpinisme et de ski je me devais d’aller y faire un tour.
Après une courte discussion, on me demande si je sais skier. Bin oui, je crois même que j’ai appris avant de savoir marcher. Quoique, faudrait demander à  mes parents.
Alors vite fait, le guide me dit que si je trouve 4 ou 5 compagnons il nous ouvre la station la plus haute du monde. Waouh, skier à  plus de 5300 m d’altitude ça motive. Le lendemain les compagnons sont tout trouvé et nous voilà  parti pour le glacier de Chacaltaya.

La “station” s’avère être une piste avec un remonte pente… enfin un câble tracté par un moteur de 2 CV sur lequel il faut s’accrocher comme on peut. Le ski à  cette altitude n’est pas la chose la plus simple que j’aie pu essayé dans ma vie, après 3 virages il faut s’arrêter pour souffler.
Dur mais jouissif, un moment inoubliable. Après à  peine trois heures de ski on est mort, complètement mort. Mais quel plaisir!

Jusque là  tout va pour le mieux, je me souviens encore de ces moments avec un sourire aux lèvres, sauf que… voilà … en avril de cette année 2007 je lis un article sur BBC mundo qui m’apprend que le glacier de Chalcaltaya est en train de disparaître de manière accélérée. Ce glacier a plus de 18 mille ans et ces 20 dernières années il a diminué de 80%. On attend sa fin pour 2015… c’est-à -dire maintenant.

à‡a m’énerve, contre moi, contre tout le monde, contre ceux qui ne veulent pas une réduction chiffrée des émissions de gaz, ça m’énerve de penser que je vais devoir apprendre à  mes enfants à  jouer au chameau et non à  skier, de penser qu’on attend parce qu’on ne sait pas quoi faire… ça m’énerve, peut être simplement parce qu’on m’a pourri mon souvenir… mais ça m’énerve.