Les FARC

En Colombie l’affirmation : “pour comprendre le présent il faut connaître l’histoire”, est encore plus vraie que dans les autres pays auxquels j’ai pu m’intéresser. La majorité de l’actualité concerne le conflit armé. On parle autant des actions des Fuerzas Armadas Revolucionarias de Colombia (FARC) que des actions contre elles, des négociations de l’Ejercito de Liberacià³n Nacional (ELN) avec le gouvernement, ou de la démobilisation des paramilitaires (AUC) (( Pour ceux que ça intéresse et qui veulent, vite fait, avoir une idée je vous invite à  lire l’historique du conflit )) .

Ces dernières années, avec le gouvernement Uribe, la situation semble avoir évolué. Tout d’abord, le Président a établi un programme de réinsertion pour les paramilitaires qui désiraient rendre les armes (( voir La Démobilisation des Paramilitaires )) . Ensuite il a militarisé le pays et contraint les FARC à  reculer dans la jungle. Ceci rend le pays plus sûr, certes, mais ne résout pas le problème de fond: les inégalités sociales, la concentration croissante de la richesse, la réforme agraire, etc.

En théorie tous ces maux sont combattus par les FARC, mais alors pourquoi ont-elles une si mauvaise image ?

Revenons à  la fin des années 80. Les forces de gauche ont enfin la possibilité de former un parti politique légal (l’Union Patriotique) et d’entrer dans le débat politique. Cependant les ultraconservateurs craignent leur montée en puissance. La persécution anti-militant de gauche débute et s’avère efficace. Plus de 4000 sont assassinés par les paramilitaires. Ceux qui sont encore vivants aujourd’hui sont ceux qui ont réussi à  fuir le pays. Suite à  de tels événements il était difficile de ne pas reprendre la lutte armée. Cependant, une seconde tentative de légalisation du mouvement des FARC a été tentée par l’ex-président Pastrana. Il leur a offert un territoire pour que les négociations se fassent dans de bonnes conditions.

Les négociations n’ont abouti à  rien. Le résultat a été catastrophique. Les FARC en ont profité pour s’enrichir (à  travers la plantation de coca et les enlèvements) et développer une véritable armée.

Suite à  cette tentative présidentielle avortée, il était évident que le peuple colombien n’allait plus accorder de confiance à  un mouvement dont le seul moyen pour atteindre leur but, est la guerre. Ces soi-disant défenseurs du peuple s’attaquent à  des villages, enlèvent n’importe quels péquins. Même les militants de gauche les rejettent.

La conséquence est l’élection du président actuel, Uribe, qui propose l’éradication pure et simple des FARC. La violence par la violence. Sa cote de popularité avoisine les 75% depuis 4 ans. Il est sur le point de se faire réélire … et les FARC existent encore.

Une bonne théorie du complot pourrait nous dire que c’est un arrangement entre eux. Cela ferait de beaux titres genre : “Les FARC et les paramilitaires se mettent d’accord pour se partager le pouvoir !”.

En étant un peu plus sérieux on peut simplement conclure que les FARC ont raté leur sortie. La sanction du peuple s’appelle Uribe. Cependant la question qu’ils devraient se poser avant d’aller voter est : qui est-ce qu’ils sanctionnent en votant pour lui ?

Pourtant je n’oserai pas affirmer que les Colombiens sont masochistes…

 

 

 

Note : pour les motivés de l’info sur les FARC: vous pouvez visiter leur site

Campagne Colombienne

 

Les campagnes électorales suisses : des débats enflammés, des politiciens hystériques qui crient dans les rues, des affiches qui pullulent dans tous les coins, des militants qui manifestent leur foi en leur candidat. Bref, le pays s’enflamme pour quelques temps avant de retomber dans sa tranquillité légendaire…

Ceci ce passe dans mes rêves les plus profonds, car le débat politique suisse est bien organisé, très civilisé et on aime le dire. On se retrouve tous et on discute autour d’une table.

En Colombie, j’en suis sûr, le potentiel existe pour que les campagnes électorales soient comme dans mes rêves : pétillantes et passionnantes. Les Colombiens ont l’énergie et l’hystérie pour s’emballer dans un débat politique, pour faire vivre une démocratie.

Cependant, la situation de conflit dans laquelle se trouve le pays depuis si longtemps, ne permet pas un épanouissement du débat politique.

Le président Uribe a beau dire que la Colombie est une démocratie (et c’est vrai), les droits et les libertés sont quelque peu différentes de celles qu’on connaît outremer.

En fait, ce cher président ressemble étrangement à  Bush, c’est un peu son petit frère. C’est un puritain qui aime l’armée et les chevaux. Il aime tellement l’armée qui l’a envoyée partout dans le pays pour écraser la guérilla. Quelque soit le prix. Du cheval il en fait à  une heure du matin dans le « Parque Nacional » en plein centre de Bogotà¡ et peu l’importe s’il doit réveiller la moitié du bataillon de la ville pour sa protection.

Son côté obscur réside dans ses liens avec les paramilitaires. Ses liens ne sont pas si obscurs car, en ce moment le soupçon qu’une partie de ses fonds de campagne proviennent du narcotrafic se camoufle entre les lignes des nouvelles colombiennes. Son « aura » est telle que le scandale a peu de chance d’éclater réellement. De plus c’est un homme de confiance, il fallait bien remercier ce petit geste financier alors, il a amnistié tous les paramilitaires qui voulaient rendre leur armes. Leurs crimes (pire que notre l’imagination nous le permet) ne seront jugés que si quelqu’un veut les dénoncer (( J’aborderai ce thème de manière plus approfondie dans un autre article. )) .

Le résultat de ce magnifique plan de paix est que maintenant 25’000 bourreaux se promènent en toute liberté et impunité.

Il est facile d’imaginer qu’une campagne électorale dans ses conditions est vite tendue. Les régions qui étaient sous l’emprise des paramilitaires le restent avec la différence que ceux-ci peuvent se présenter aux élections. Dès le mois de janvier Amnesty International a commencé à  dénoncer cette situation (rapport d’Amnesty). Il faut dire que plusieurs journalistes ont reçu des menaces de mort, à  ce jour quatre candidats ont été assassinés et nombreux sont ceux qui ont été menacés. « On savait comment allait être la campagne, l’important est de faire très attention à  soi et de ne pas se laisser intimider » (( Ya todos sabà­amos cà³mo iba a ser la campaà±a, lo importante es cuidarse mucho y no dejarse intimidarsemana )) nous dit Gustavo Petro du parti Polo Democratico Alternativo (gauche).

Cependant il ne faut pas croire que les menaces sont le monopole des « ex » paramilitaires, la guérilla use aussi ce procédé dans les régions qu’elle maîtrise. Il est d’ores et déjà  possible d’établir une carte des résultats du moment où l’ont connaît les déplacements des forces en présence.

Les seuls lieux où on aperçoit encore la lumière de la liberté ce sont les grandes villes comme Bogotà¡. Mais là  encore il ne faut pas trop rêver, les quartiers défavorisés ne sont pas des havres de paix. Les leaders de gauche se voient confinés à  la maison s’ils veulent pouvoir continuer leur lutte après les élections.

Il ne nous reste plus qu’à  se demander : mais que fait la police ? Où est l’armée ? La réponse est simple : elles obéissent au Président.