La vie, les blogs et les spams

Boites de spamTrop d’information tue l’information, a-t-on coutume d’entendre; mais c’est oublier que maintenant, trop de spam tue aussi l’information. Les expéditeurs de messages publicitaires non sollicités (spam) modifient les possibilités d’internet, et je vais tenter de démontrer comment.

Il n’y a pas si longtemps (moins de deux ans), ce blog était protégé au moyen d’un CAPTCHA, un système d’affichage aléatoire de mots, que le commentateur à un message devait recopier pour prouver sa « qualité d’être humain ». Difficile à recopier par une machine, ce code permettait d’éliminer les robots de spams, ces messages publicitaires envahissant vantant les bienfaits d’une pilule bleue qui a changé la vie des hommes impuissants, des allongeurs de pénis, des pilules pour maigrir, du botox, et je m’arrêterai là. Puis, il y a une année, parce que les robots devenaient plus évolués et semblaient dorénavant en mesure de décrypter les textes, je suis passé à Akismet, un système faisant des tests sur les messages, pour reconnaître automatiquement s’il s’agit d’un spam ou non. Je n’ai jamais compris la technologie en oeuvre et comment il parvenait à obtenir un résultat stupéfiant sans presque aucune erreur; mais croyez-moi, ça fonctionne sans accroc.

A tel point qu’il m’arrête entre 150 et 300 spams par jour; c’est le nombre de messages vantant les produits précédemment mentionnés qui devraient être affichés en commentaires sous mes messages. Ca représente, grosso modo, 1 commentaire par jour pour chacun de mes messages. En l’espace de 15 jours, mon blog serait tellement contaminé que je devrais mettre la clé sous la porte, ou ôter aux internautes toute possibilité de commenter mes messages.

C’est d’ailleurs ces solutions qu’ont retenus certains blogueurs, ne souhaitant pas perdre leur temps à potasser les techniques de protection; le spam est tellement exploité qu’il en devient auto-destructeur. Il a des effets de censure abominables, puisqu’il ôte (temporairement) un certaine liberté à Internet : j’ai dû désactiver la possibilité de laisser des commentaires dans la galerie, rendre obligatoire l’inscription pour le forum, fermer le système de réception par e-mail des nouveaux messages, passer des heures pour verrouiller un wiki d’information que je tiens, et je commence depuis peu à avoir des problèmes avec le formulaire de contact. Toutes les opportunités pour envoyer quelques messages contenant parfois des dizaines de liens sans intérêt sont saisies. La pollution engendrée par le spam est telle, que celui-ci change la face d’internet. Il modifie la façon qu’ont les internautes de communiquer; à mes yeux, loin d’être une péripétie de l’évolution de la toile mondiale, c’est un handicap majeur à son extension. Le Web 2.0, qui se veut (entre autre) très participatif, est confronté à cet obstacle.

Enquête au blog

C’est animé par la curiosité que j’ai tenté une opération. En mettant en place un second blog dont le seul lien (connu) pointait depuis le blog actuel (théoriquement, c’est donc le seul moyen pour les robots de spam de découvrir ce second blog), j’ai désactivé toutes les protections possibles pour permettre aux robots de spam de s’en donner à coeur joie.

C’est le 28 février que ce blog de test a été mis en place. Le premier spam est arrivé le 18 mars, soit une période de 18 jours pour subir le premier spam. Le tableau ci-après résume l’évolution suivie par le spamming :

Évolution du spam sur blog

Le blog est devenu inutilisable dès le 30 mars, soit 31 jours après l’ouverture du blog. Avec 400 spams sur le blog pour cette seule journée, c’est presque 17 spams à l’heure – et plus d’un spam toutes les 4 minutes ! Cela monte à un toutes les 2 minutes le lendemain : autant dire qu’il serait illusoire de gérer un tel raz-de-marée manuellement, et que des outils seront nécessaire pour se débarrasser des pourriels qui paralyseraient entièrement le blog. Le 4 avril, j’ai réactivé les protections par défaut de Worpress, qui prévoient une modération (validation par le blogmaster pour apparaître sur le journal électronique) pour tous les commentaires d’auteurs qui publieraient pour la première fois. Perdus dans les centaines de spams de ce jour-là, j’ai lâché un vrai message en pâture, qui fût retenu, conformément à ce qui était prévu, pour modération. Le seul problème, c’est qu’avec cette protection on passe plus de temps à vérifier la validité des commentaires à son blog (plusieurs centaines par jour !) qu’à écrire des billets sur celui-ci… Tout rentrera dans l’ordre le 5 avril, où j’activerai la protection qui a révolutionné le combat contre les messages publicitaires, akismet. Seuls les commentaires humains passeront, et les spams trépasseront sans requérir d’intervention du blogmaster.

Perspective spamique dans le web

La bataille du blog est gagnée, mais qui gagne vraiment ? Il y a du spam absolument partout aujourd’hui. Pour l’email, on parle de 2 messages sur 3 qui seraient des « pourriels », pour reprendre le terme d’origine canadienne. Les forums web et les newsgroups connaissaient également une telle pollution électronique depuis des années. Avec la montée exponentielle du nombre de blogs, le spam s’est déplacé pour envahir sans état d’âme ces journaux privés ou intimes. A tel point que des robots plus perfectionnés ont été conçus, et envoient de manière automatique des spams à travers les formulaires de contact. On se demande bien qui va suivre les liens ainsi envoyés… et on se demande quel est l’impact marketing réel d’une telle stratégie publicitaire. Car même si quelques clics sont peut-être effectués de temps à autre, c’est bien parce que de telles campagnes publicitaires n’ont aucun coût qu’elles continuent à être menées. En d’autres termes, le succès du spam aujourd’hui est uniquement dû à sa quasi gratuité : envoyer un message publicitaire non sollicité ne coûte rien du tout.

Si la solution contre ce fléau passe par la coopération internationale (comme pour tout ce qui touche aux fraudes sur internet), il faut amener à rendre le spam payant pour les émetteurs. Les poursuites judiciaires assorties de lourdes amendes se profilent comme le moyen le plus approprié; si l’envoi en masse de spams devient payant pour l’expéditeur, il y a fort à parier que ce comportement disparaîtra rapidement.

Cet article a 8 commentaires

  1. Jean-Marc

    « ce blog était protégé au moyen d’un CAPTCHA, un système d’affichage aléatoire de mots, que le commentateur à un message devait recopier pour prouver sa “qualité d’être humain” »

    çà y est, c est confirmé : je ne suis pas humain :
    pour la première fois, j ai été incapable de remplir un captcha :'(

    la preuve :
    http://img150.imageshack.us/img150/357/captchaij7.png

  2. jcv

    If you are looking to use my wordpress layout, drop me a mail.

  3. Anonyme

    Hello. May I rent your layout for my site? 🙂

  4. jcv

    En fait je crois que les principales cibles des robots spammeurs ne sont pas les internautes, mais les autres robots tels que les indexeurs de moteurs de recherche (Google & Cie). Ce sont eux qui ont tendance à suivre aveuglément ces monstrueuses listes de liens. C’est donc une guerre de robots contre robots, où les humains ne sont que des victimes collatérales.

    Je ne sais pas. Le google bombing a été tellement popularisé depuis certains « Miserable failure » et « failure », que les protections contre ce genre d’action doivent être drastiques. Entres toi-même « viagra » sur google, tu verras… le système de ranking de google est bien plus complexe que cela. Et privilégie la quantité de texte avant et après les mots-clés, ce qui disqualifie d’office nos ouvriers du marketing moderne.

    De plus, on se demande l’influence sur le page ranking lorsqu’on utilise les formulaires de contact pour envoyer ses fichus spams; peut-être un robot bêtement programmé pour repérer les champs

    et poster sans autre forme de contrôle ?

    Le spam coûte à l’économie mondiale (au contraire de l’acte de spamming lui-même), énerve les utilisateurs privés, et a directement un impact sur la forme des fonctionnalités d’internet. C’est très agaçant.

  5. s427

    On se demande bien qui va suivre les liens ainsi envoyés…

    En fait je crois que les principales cibles des robots spammeurs ne sont pas les internautes, mais les autres robots tels que les indexeurs de moteurs de recherche (Google & Cie). Ce sont eux qui ont tendance à suivre aveuglément ces monstrueuses listes de liens. C’est donc une guerre de robots contre robots, où les humains ne sont que des victimes collatérales. 😉

    Le but du spammeur n’est pas de gagner des clients directement grâce à la pub qu’il envoie sur les blogs (contrairement aux spams par e-mail, où c’est effectivement le but); son but est de faire gonfler artificiellement son « page ranking », et de voir son site figurer en tête des résultats lorsqu’on recherche « viagra » sur Google.

    En tout cas j’ai le même problème que toi (à vue de nez, à peu près autant de spams par jour, d’ailleurs). Pour ma part j’utilise un filtre bayésien (SpamClear, un plugin pour dotclear) qui fonctionne très bien (c’est très rare qu’il laisse passer un spam, et il ne m’a jamais retenu un bon commentaire par erreur).

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