Les blogs sont-ils l’information de demain ? – 2ème partie

Plaidoyer pour une utilisation des nouvelles technologies de l’informations d’une manière vraiment novatrice.

La première partie de cette réflexion terminait sur un constat : les blogs ont toutes les chances de devenir une source d’information privilégiée de demain, en raison du court-circuitage des médias et des pouvoirs. Mais la réflexion se poursuit ici car, après tout, cette caractéristique de pied de nez à la hiérarchie est propre à internet, et pas aux blogs : les grands quotidiens possèdent eux aussi des pages sur la toile. Et surgit dès lors un questionnement sur les avantages du blog vis-à-vis de ces « portails » que sont les sites webs des journaux officiels, dont la seule approche de l’interactivité se résume trop souvent à créer des forums non modérés pour que les lecteurs interagissent entre eux. Voilà qui n’aide pas à la distinction des rôles journaliste/politicien/citoyen, puisque toute personne participant à ces forums peut avoir l’impression d’être à même d’endosser les trois casquettes à la foi, ayant l’impression que le journaliste se contente d’émettre une simple opinion : il en irait tout autrement si (p.ex.) des journalistes modéraient ce type de discussion…

La question surgit dès lors : qu’apporte un blog ? Quels sont ses avantages vis-à-vis des portails des grands quotidiens ? Chaque système a ses propres avantages, en fonctions des moyens à disposition et des contraintes propres à son dispositif structurel originel. Par dispositif structurel originel, j’entends l’origine de la structuration du réseau informatif : le site web d’un journal est dépendant du savoir-faire du monde de la presse écrite, avec ses mécanismes cognitifs et ses réflexes traditionnels. Un blog peut, pour autant que le rédacteur n’ait pas ou peu été formaté par ce monde, développer son propre dispositif structurel originel. Enfin, les deux modes d’expressions partages avantages et désavantages propres à internet.

Sans chercher à établir une liste exhaustive de chacune des deux formes, on peut relever certaines caractéristique propres ou communes à celles-ci :

: internet en général :

1/ Cadre matériel commun au blog et au sites des journaux, le world wide web, plus connu sous son diminutif « web », et qui ne reste qu’une partie utilisée des possibilités offertes par internet (citons en vrac l’email, les newsgroups, le chat, etc.). Elaboré par Tim Berners-Lee du CERN en 1989, le lien html doit relier les pages web entre elles ou en elles-même (lien vers une autre section du document). On était loin de se douter que, quelques années plus tard, des moteurs de recherche (avec en tête de ligne google) allaient rendre moins vitaux de tels liens.

Néanmoins, l’utilisation de ces liens (appelés couramment liens hypertexte) peut, lorsqu’utilisé de manière pertinente, représenter un raccourci non négligeable. En lieu et place d’une citation, une résumé maladroit d’un article ou encore une traduction hasardeuse d’un auteur, il suffit d’ajouter une lien hypertexte pointant sur la source d’origine. Libre au lecteur de se faire une opinion de l’interprétation du journaliste, de l’utilisation que fais celui-ci de ses sources. Le développement d’un esprit critique est ainsi encouragé.

2/ Mentionné dans le précédent point, la possibilité d’effectuer des recherches précises et rapides selon des mots-clés donnés. Tout le monde a aujourd’hui le réflexe google, mais rechercher à l’intérieur d’une page une expression ou un terme est un gain de temps non négligeable. Possibilité offert pour tout support numérique (à moins d’un bridage effectué à escient), on peut effectuer des comparaisons, suivre l’évolution d’une affaire, s’assurer d’avoir une perspective historique suffisante pour en comprendre les tenants et les aboutissants.

3/ Approfondissant le premier point, le web offre une palette d’outils permettant d’étendre l’expérience informationnelle. Au moyen du langage web (le html), il est possible d’afficher des aides sur les mots, de réaliser des mises en page impossibles sur un format papier.

A ce titre, la disposition des menus, des images, des titres, etc. peut faciliter grandement la navigation du lecteur. Créer un dossier sur un pays, par exemple, après avoir conçu différents articles sur le sujet. Les possibilités didactiques sont infinies.

: le blog :

1/L’indépendance du blog est peut-être l’avantage le plus visible de cette technologie. En premier lieu, en ce qui concerne le financement, un blog n’est généralement pas dépendant d’annonceurs. Ou lorsqu’il l’est, c’est par le biais de centres d’annonces (les adsense de google, par exemple), ce qui déconnecte totalement l’annonceur et le blog lui-même.

En plus de cette « dépersonalisation » économique, il faut noter l’indépendance politique d’un blog : en cas d’ennuis avec les autorités (économiques ou politiques), rien de plus facile que de déplacer son agora à l’étranger, dans un pays qui serait plus libéral quant aux sujets abordés.

Le blog est donc déconnecté politiquement et économiquement des supports traditionnels propres aux journaux; un grand quotidien pourrait être forcé par les autorités politiques ou économiques, et cela de manière informelle ou plus formelle, de retirer un article polémique. On imagine mal le jjournal changer d’hébergeur internet, dès lors que le « support papier » continuera à être publié dans le pays, et subira toujours les mêmes pressions…

Pour éviter le parti pris des lignes éditoriales étasuniennes, les pressions que subissent les journaux français par les groupes qui les rachètent (voir en particulier la « conception » des idées saines selon Dassault, et sa « conception » de l’indépendance à l’Express), ou encore les censures pures et simples asiatiques, le blog semble se profiler comme une solution.

On trouve pléthore de blogs de journalistes qui ont leur propre blog pour outrepasser une censure, un « rewrinting » (voir le lien) ; on le voit déjà, les journalistes utilisent les deux types de médias, ce qui peut amener de premier abord à une confusion des rôles dans l’esprit des lecteurs.

Dans le blog de Daniel Schneidermann, les choses sont plus claires, il l’utilise comme exutoire à ses coups de sang, pouvant y écrire ce qu’il ne pourrait se permettre ailleurs.

2/ Une liberté de ton. Peut-être est-ce le fait du manque de professionnalisation des blogs, ou peut-être de la non-institionnalisation, ou peut-être plus encore le résultat de l’indépendance; mais un blog, sans qu’il ait à être personnel, se pose en informateur plus subjectif que le journal.

Le travers qui effraye réside dans la trop grande subjectivité, et que le journaliste s’écarte d’une information honnête et sincère; mais si tout est entrepris pour éviter cet écueil, le lecteur peut se retrouver, en échange, avec un sentiment d’immersion plus profond.

: sites web des journaux :

1/ L’accès à des archives audios/vidéos, avec en chef de fil la BBC, développant sa licence creative archive (directement inspérée de la licence creative commons). Le but est de donner accès à toutes ses émissions télé.

Pour réaliser un tel « coup de force », il faut tout d’abord avoir des moyens aussi conséquents que ceux de la BBC, et deuxièmement avoir quelque chose à montrer, c’est à dire une quantité d’archives aussi énormes, et de qualité aussi élevée.

2/ La garantie de l’information. Ce point reste cependant très discutable, en raison du problème de dépendance déjà évoqué des journaux.

Il reste néanmoins difficile de paraître suffisamment crédible envers le lecteur pour, par exemple, démentir une information parue dans une site d’un quotidien de référence. Le côté institutionnel est exactement ce qui rassure le lecteur : la pérennité du journal doit être assuré, la rédaction doit se prémunir contre tout dérapage, vérifier les informations.

Pourtant, Daniel Schneidermann, précédemment cité, a déjà eu été épinglé pour plagiat du portail des copains. Voilà que Le Monde, référence s’il en est dans la presse francophone, se met à recopier sans autre forme de procédure un site internet. Assurément, les lecteurs fidèles aux journaux ont quelques idées préconçues à s’ôter.

Pour procéder à une synthèse de tout ce qui vient d’être écrit, je ne saurais trop conseiller la lecture de blogsofwar.com. Selon l’auteur, la barre des 2 millions d’internautes annuels devrait être franchit à la fin de l’année. Blog parfois aux accents personnels, il reste dénonciateur, provoquant, mais assurément informant. Reste à acquérir la crédibilité, si nécessaire aux futurs blogs.

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